J.LACAN                        gaogoa

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IX- L'IDENTIFICATION

            Version rue CB                                    note

Séminaire du 17 janvier 1962

 

 

(->p155) (VIII/1)          Je ne pense pas que pour paradoxal     puisse    apparaître au premier abord la symbolisation sur laquelle j'ai terminé mon discours la dernière fois, faisant supporter le sujet par le symbole mathématique du racine de -1,  je ne pense pas que tout pour vous puisse n'être là-dedans que pure surprise. Je veux dire qu'à se rappeler la démarche cartésienne elle-même, on ne peut oublier ce à quoi cette démarche mène son auteur. Le voilà parti d'un bon pas vers la vérité, plus encore : cette vérité n'est nullement, chez lui comme chez nous, mise en la parenthèse d'une dimension qui la distingue de la réalité cette vérité sur quoi Descartes s'avance de son pas conquérant, c'est bien de celle de la chose qu'il s'agit, et ceci nous mène à quoi ? à vider le monde jusqu'à n'en plus laisser ce vide qui s'appelle l'étendue. Comment cela est-il possible ?

                       Vous le savez, il va choisir comme exemple : faire fondre un bloc de cire. Est-ce par hasard qu'il choisit cette matière si ce n'est pas qu'il y est entraîné parce que c'est la matière idéale pour recevoir le sceau, la signature divine. Pourtant, après cette opération quasi alchimique qu'il poursuit devant nous, il va la faire s'évanouir, se réduire n'être plus que l'étendue pure, plus rien qui puisse s'imprimer. Si justement dans sa démarche, il n'y a plus de rapport entre le signifiant et aucune trace naturelle, si je puis m'exprimer (->p156) (VIII/2) ainsi, et très nommément trace naturelle par excellence qui constitue l'imaginaire du corps, ce n'est pas dire justement que cet imaginaire puisse être radicalement repoussé. Mais il est séparé du jeu du signifiant. I1 est ce qu'il est : effet du corps, et comme tel récusé comme témoin d'aucune vérité ; rien à en faire que d'en vivre, de cette imaginaire théorie des passions, mais ne surtout pas penser avec : l'homme pense avec un discours réduit aux évidences de ce qu'on appelle la lumière naturelle, c'est-à-dire un groupe logistique qui, dès lors, aurait pu être autre si Dieu l'avait voulu (Théorie des passions).

            Ce dont Descartes ne peut encore s'apercevoir, c'est que nous pouvons le vouloir à sa place, c'est que quelques 150 ans après sa mort naît la théorie des ensembles - elle l'aurait comblée - ou même les chiffres un et zéro ne sont que l'objet d'une définition littérale, d'une définition axiomatique purement formelle, élément neutre. I1 aurait pu faire l'économie du Dieu véridique, le Dieu trompeur ne pouvant être que celui qui tricherait dans la résolution des équations elles-mêmes. Mais personne n'a jamais vu ça : il n'y a pas de miracle de la combinatoire, si ce n'est le sens que nous lui donnons ; c'est déjà suspect chaque fois que nous lui donnons un sens. C'est pourquoi le Verbe existe, mais non pas le Dieu de Descartes . Pour que le Dieu de Descartes existe, il faudrait que nous ayons un petit commencement de preuve de sa volonté créatrice à lui dans le domaine des mathématiques. Or, ce n'est pas lui qui a inventé le transfini, le quantum, c'est nous. C'est bien pourquoi l'histoire nous témoigne que les grands mathémati-(->p157) (VIII/3)ciens , qui ont ouvert cet au-delà de la logique divine, Euler tout le premier, ont eu très peur ; ils savaient ce qu'ils faisaient, ils rencontraient, non pas le vide de l'étendue du pas cartésien, qui finalement, malgré Pascal, ne fait plus  peur à personne parce qu'on s'encourage à aller l'habiter, de plus en plus loin, mais le vide de l'Autre, lieu infiniment redoutable puisqu'il y faut quelqu'un. C'est pourquoi, serrant de plus près la question du sens du sujet tel qu'il s'évoque  dans la méditation cartésienne, je ne crois là rien faire - même si j'empiète sur un domaine tant de fois parcouru  qu'il fini par paraître en devenir réservé à certains -  je ne crois pouvoir  faire quelque chose dont il puisse se désintéresser, cela pour autant que la question est actuelle, plus actuelle qu'aucune, et plus actualisée encore - je crois pouvoir vous le  montrer - dans la psychanalyse qu'ailleurs.

                Ce vers quoi je vais donc aujourd'hui vous ramener, c'est à une considération, non de l'origine, mais de la position du sujet, pour autant qu'à la racine de l'acte de la parole il y a quelque chose, un moment où elle s'insère dans une structure de langage, et que cette structure de langage, en tant qu'elle est caractérisée  à ce point originel, j'essaie de la resserrer, de la définir autour d'une thématique qui, de façon imagée, s'incarne, est comprise dans l'idée d'une contemporanéité originelle de l'écriture et du langage, et que l'écriture est connotation signifiante, que la parole ne la crée pas tant qu' elle ne la lie, que la genèse du signifiant à un certain niveau du réel qui est un de ses axes ou racines, c'est pour nous  sans doute le principal à connoter la venue au jour des effets, (->p158) (VII/4) dits effets de sens.

                            Dans ce rapport premier du sujet, dans ce qu'il projette devant lui, nachträglich par le seul fait de s'engager par sa parole, d'abord balbutiante, puis ludique, voire confusionnelle dans le discours commun, ce qu'il projette en arrière de son acte, c'est là que se produit ce quelque chose vers quoi nous avons le courage d'aller pour l'interroger au nom de la formule : "wo es war, soll ich werden", que nous tendrions à pousser vers une formule très légèrement différemment accentuée dans le sens d'un étant ayant été, d'un Gewesen qui subsiste pour autant que le sujet s'y avançant ne peut ignorer qu'il faut un travail de profond retournement de sa position pour qu'il puisse s'y saisir. Déjà là, quelque chose nous dirige vers quelque chose qui est très contreversé, nous suggère la remarque qu'à soi toute seule, dans son existence, la négation n'est pas depuis toujours sans recéler une question. Qu'est-ce qu'elle suppose ? Suppose-t-elle l'affirmation sur laquelle elle s'appuie ? Sans doute. Mais cette affirmation, est-ce bien elle seulement l'affirmation de quelque chose du réel qui serait simplement ôté ? Ce n'est pas sans surprise, ce n'est pas non plus sans malice que nous pouvons trouver sous la plume de Bergson quelques lignes par lesquelles il s'élève contre toute idée de néant, position bien conforme à une pensée dons son fond attachée à une sorte de réalisme naïf.

                        I1 y a plus, et non pas moins, dans l'idée d'un objet conçu comme n'existant pas, que dans l'idée de ce même  objet conçu comme existant, car l'idée de l'objet n'existant (->p159) (VIII/5) pas est nécessairement l'idée de l'objet existant avec, en plus , la représentation d'une exclusion de cet objet par 1a réalité actuelle prise en bloc".

                Est-ce ainsi que nous pouvons nous contenter de le situer ? Pour un instant, portons notre attention vers la négation elle-même. C'est ainsi que nous pouvons nous contenter, dans une simple expérience de son usage, de son emploi d'en situer les effets.

             Vous mener à cet endroit par tous les chemins, d'une enquête  linguistique est quelque chose que nous ne pouvons nous refuser. Au reste, déjà, nous sommes-nous avancés dans ce sens, et si vous vous en souvenez bien, l'allusion a été faite dès longtemps aux remarques certainement très suggestives ,  sinon éclairantes, de Pichon ou de Damourette, dans leur collaboration à une grammaire fort riche et très féconde à considérer, grammaire spécialement de la langue française dans laquelle leurs remarques viennent à pointer qu'il n'y a pas, disent-ils, à proprement parler de négation en français.
 Ils entendent dire que cette forme simplifiée à leur sens de l'ablation radicale, telle qu'elle s'exprime à la chute de certaines phrases allemandes, j'entends à la chute parce que c'est bien le terme nicht qui à venir d'une façon surprenante, à la conclusion d'une phrase poursuivie en registre a permis à l'auditeur de rester jusqu'à son terme dans la plus parfaite indétermination et foncièrement dans une position de créance ; par ce nicht qui la rature, toute la signification de la phrase se trouve exclue, exclue de quoi ? du champ de l'admissibilité de la  vérité.

(->p160) (VIII/6)     Pichon remarque, non sans pertinence, que la division, la schize plus ordinaire en français de la négation entre un "ne" d'une part, et un mot auxiliaire, le "pas'", la "personne", le "rien", le "point", la "mie", la "goutte", qui occupent une position dans la phrase énonciative qui reste à préciser par rapport au "ne" nommé d'abord, que ceci vous suggère nommément, à regarder de prés l'usage séparé qui peut en être fait, d'attribuer à l'une de ces fonctions une signification dite discordantielle, à l'autre, une signification exclusive .

        C'est justement d'exclusion du réel que serait que serait chargé le "pas", le "point", tandis que le "ne" exprimerait cette dissonnance parfois si subtile qu'elle n'est qu'une ombre, et nommément dans ce fameux "ne" dont vous savez que j'ai fait grand état pour essayer pour la première fois justement d'y montrer quelque chose comme la trace du sujet de l'inconscient, le "ne" dit explétif. Le "ne" de ce "je crains qu'il ne vienne" vous touchez aussitôt du doigt qu'il ne veut rien dire d'autre que "j'espérais qu'il vienne", il exprime la discordance de vos propres sentiments à l'endroit de cette personne, qu'il véhicule en quelque sorte la trace combien plus suggestive d'être incarnée dans son signifiant puisque nous l'appelons en psychanalyse ambivalence : "je crains qu'il ne vienne" ce n'est pas tant exprimer l'ambiguïté de nos sentiments que par cette surcharge montrer combien, dans un certain type de relations, est capable de ressurgir, d'émerger, de se reproduire, de se marquer en une béance, cette distinction du sujet de l'acte de l'énonciation en tant que tel, par rapport au sujet de l'énoncé ! Même s'il n'est pas présent au niveau de l'énoncé d'une (->p161) (VIII/7) façon qui le désigne. "Je crains qu'il ne vienne" c'est un tiers ; ce serait s'il était dit "je crains que je ne fasse" - ce qui ne se dit guère, encore que ce soit concevable - qui serait au niveau de l'énoncé ; pourtant, ceci importe peu qu' il soit désignable - vous voyez d'ailleurs que je peux l'y faire rentrer - au niveau de l'énoncé ; et un sujet, masqué ou pas au niveau de l'énonciation, représenté ou non, nous amène à nous poser la question de la fonction du sujet, de sa forme, de ce qu'il supporte, et à ne pas nous tromper, à ne pas croire que c'est simplement le je qui, dans la formulation de l'énoncé, le désigne comme celui qui, dans l'instant qui définit le présent, porte la parole

        Le sujet de l'énonciation a peut-être toujours un autre support. Ce que j'ai articulé, c'est que, bien plus, ce petit "ne", ici saisissable sous la forme explétive, c'est là que nous devons en reconnaître, à proprement parler dans un cas exemplaire le support, et aussi bien ce n'est pas dire, bien sûr, non plus que dans ce phénomène d'exception nous devons reconnaître son support exclusif .

        L'usage de la langue va me permettre d'accentuer devant vous d'une façon très banale, non pas tant la distinction de Pichon - à la vérité, je ne la crois pas soutenable jusqu'à son terme descriptif ; phénoménologiquement elle repose sur l'idée, pour nous, inadmissible qu'on puisse en quelque sorte fragmenter les mouvements de la pensée. Néanmoins, vous avez cette conscience linguistique qui vous permet tout de suite d' apprécier l'originalité du cas où vous avez seulement, où vous pouvez dans l'usage actuel de la langue - cela n'a pas toujours été ainsi : dans des temps archaïques la forme que je vais, (->p162) (VIII/8)  maintenant formuler devant vous était la plus commune ; dans toutes les langues, une évolution se marque comme d'un glissement que les linguistes essaient de caractériser des formes de la négation. Le sens dans lequel ce glissement s'exerce - j'en dirai peut-être tout à l'heure la ligne générale, elle s'exprime sous la plume des spécialistes, mais pour l'instant prenons le simple exemple de ce qui s'offre à nous tout simplement - dans la distinction entre deux formules également admissibles, également reçues, également expressives, également communes : celle du "je ne sais" avec le "j'sais pas". Vous voyez, je pense tout de suite quelle en est la différence, différence d'accent. Ce "je ne sais" n'est pas sans quelque maniérisme, il est littéraire, il vaut quand même mieux que "jeunes nations" mais il est du même ordre. Ce sont tous les deux Marivaux, sinon rivaux.

        

 

 

 

            Ce qu'il exprime, ce "je ne sais", c'est essentiellement quelque chose de tout à fait différent de 1'autre code d'expression de celui du "j'sais pas" : il exprime l'oscillation, l'hésitation, voire le doute. Si j'ai évoqué Marivaux, ce n'est pas pour rien : il est la forme ordinaire sur la scène où peuvent se formuler les aveux, voilés. Auprès de ce "je ne sais", il faudrait s'amuser à orthographier, avec (->p163) (VIII/9) 1"ambiguïté donnée par mon jeu de mots, le "j'sais pas" par l'assimilation qu'il subit du fait du voisinage du s inaugural du verbe, le j du je qui devient che aspirant qui est par là sifflante sourde. Le ne ici avalé disparaît : toute la phrase vient reposer sur le "pas" lourd de l'occlusive qui la détermine, L'expression ne prendra son accent d'accentuation un peu dérisoire, voire populassière à l'occasion, justement que de son discours avec ce qu'il y aura d'exprimé alors. Le "j'sais pas" marque, si je puis dire, même le coup de quelque chose où tout au contraire le sujet vient se collapser, s'aplatir.

"Comment ça t'est-il arrivé" demande l'autorité, après quelque triste mésaventure, au responsable : "j'sais pas"
C'est un trou, une béance qui s'ouvre au fond de laquelle ce qui disparaît, s'engouffre, c'est le sujet lui-même, mais ici  il n'apparaît plus dans son mouvement oscillatoire, dans le support qui lui est donné de son mouvement originel. Mais tout au contraire, sous une forme de constatation de son ignorance proprement parler exprimée, assumée, plutôt projetée, constatée, c'est quelque chose qui se présente comme un n'être pas là, projeté sur une surface, sur un plan où il est comme tel reconnaissable.

 

    Et ce que nous approchons par cette voie dans ces  remarques contrôlables de mille sortes, par toutes sortes d'autres exemples, c'est quelque chose dont au minimum nous devons retenir l'idée d'un double versant. Est-ce que ce double versant est vraiment d'opposition, comme Pichon le laisse entendre, quant à l'appareil lui-même, est-ce qu'un examen plus (->p164) (VII/10) poussé peut nous permettre de le résoudre  ?

        Remarquons d'abord que le "ne" de ces deux termes a l'air d'y subir l'attraction de ce qu'on peut appeler le groupe de tête de la phrase, pour autant qu'il est saisi, supporté par la forme pronominale ; ce peloton de tête en français est remarquable dans les formules qui l'accululent (?-le claviste)  telles que "je ne le" "je le lui", ceci groupé avant le verbe n'est certainement pas sans refléter une profonde nécessité structurale : que le ne vienne s'y agréger, je dirais que ce n'est pas là ce qui nous parait plus remarquable. Ce qui nous parait le plus remarquable est ceci : c'est qu'à venir s'y agréger, il en accentue ce que j'appellerai la signification subjective.

        Remarquez en effet, que ce n'est pas un hasard si c'est au niveau d'un "je ne sais", d'un "je ne puis" d'une certaine catégorie qui est celle des verbes où se situe, s'inscrit la position subjective elle-même comme telle, que j'ai trouvé mon exemple d'emploi isolé de "ne". Il y a en effet tout un registre de verbes dont l'usage est propre à nous faire remarquer que leur fonction change profondément d'être employés à la première ou à la seconde ou à la troisième personne. Si je dis "je crois qu'il va pleuvoir" ceci ne distingue pas de mon énonciation qu'il va pleuvoir, un acte de croyance ; je crois qu'il va pleuvoir connote simplement le caractère contingent de ma prévision. Observez que les choses se modifient si je passe aux autres personnes : "tu crois qu'il va pleuvoir" fait beaucoup plus appel à quelque choses : celui à qui je m' adresse, je fais appel à son témoignage. "Il croit qu'il va (->p165) (VIII/11) pleuvoir" donne  de plus en plus de poids à 1'adhésion du sujet à sa créance. L'introduction du "ne" sera toujours facile quand il vient s'adjoindre à ces trois supports pronominaux de ce verbe qui a ici fonction variée : au départ de la nuance énonciative jusqu'à l'énoncé d'une position du  sujet ;  le poids du  "ne" sera toujours pour le ramener vers la nuance énonciative.
"Je ne crois pas qu'il va pleuvoir", c'est encore plus lié au caractère de suggestion dispositionnelle qui est la mienne. Cela peut n'avoir absolument rien à faire avec une non-croyance, mais simplement avec ma bonne humeur.
"Je ne crois pas qu'il va pleuvoir",  "je ne crois pas qu'il pleuve", cela veut dire que les chose  me paraissent pas mal se présenter.

            De même, à l'adjoindre  aux deux autres formulations, ce qui d'ailleurs va distinguer deux autres personnes, le "ne"' tendra à "je-iser" ce dont dans les autres formules il s'agit. "Tu ne crois pas qu'il va pleuvoir", "il ne croit pas qu'il doive pleuvoir". C'est bien en tant que, c'est bien attiré vers le "je" qu'ils seront par le fait que c'est avec l'adjonction de cette petite particule négative qu'ils sont ici introduits dans le premier membre de la phrase.

            Est-ce à dire qu'en face, nous devions faire du "pas" quelque chose qui, tout brutalement, connote le pur et simple fait de la privation ? Ce serait assurément la tendance de l'analyse de Pichon, pour autant qu'il en trouve en effet à grouper les exemples à donner toutes les apparences. En fait (->p166) (VIII/12)   je ne le crois pas pour des raisons qui tiennent d'abord à  l'origine même des signifiants dont il s'agit. Sûrement, nous avons la genèse historique de leur forme d'introduction dans l'usage. Originellement, "je n'y vais pas" peut s'accentuer par une virgule "je n'y vais pas pas", si je puis dire ; "je n'y vois point" : même pas d'un point  ; "je n'y trouve goutte", "il n'en reste mie", il s'agit bien de quelque chose qui, loin d' être dans son origine la connotation d'un trou de l'absence, exprime  bien au contraire la réduction, la disparition sans doute, mais non achevée, laissant derrière elle le sillage du  trait le plus petit, le plus évanouissant.

                En fait , ces mots faciles à restituer à leur valeur positive, au point qu'ils sont couramment employés avec cette valeur, reçoivent bien leur charge négative du glissement qui se produit vers eux de la  fonction du "ne", et même si le "ne" est élidé, c'est bien sur eux de sa charge qu'il s'agit dans fonction qu'il exerce. Quelque chose si l'on peut dire, de réciprocité, disons, de ce "pas" et de ce "ne" nous sera apporté par ce qui se passe quand nous inversons leur ordre dans l'énoncé de la phrase.

            Nous disons -exemple de logique- "pas" un homme qui ne mente. C'est bien là  le "pas" qui ouvre le feu. Ce que j'entends ici désigner, vous faire saisir, c'est que le "pas" pour ouvrir la phrase ne joue absolument pas la même fonction qui lui serait attribuable, au dire de Pichon, si celle-ci était celle qui s'exprime dans la formule suivante : j'arrive et constate : "il n'y a ici pas un chat".
Entre nous, laissez-moi vous signaler au passage la valeur (->p167) (VIII/13)
éclairante, privilégiée,  voir redoublante de l'usage même d'un tel mot : pas un chat. 
Si nous avions à faire le catalogue des moyens d'expression de la négation, je proposerais que nous mettions à la rubrique ce type de mots pour devenir comme un support de la négation, ils ne sont pas du tout sans constituer une catégorie. Qu'est-ce que le chat a à faire dans la question ?

Mais laissons cela pour le moment.

        "Pas un homme qui ne mente" montre sa différence avec ce concert de carence, quelque chose qui est tout à fait à  un autre niveau et qui est  suffisamment indiqué par l'emploi du subjonctif.

                Le "pas un homme qui ne mente" est du même niveau qui motive, qui définit toutes les formes les plus discordantielles, pour employer 1a terme de Pichon, que nous puissions attribuer au "ne" depuis le "je crains qu'il ne vienne" jusque le "avant qu'il ne vienne", jusqu'au "plus petit que je ne le croyais", ou encore, "il y a longtemps que je ne l'ai vu", qui posent - je vous le dis au passage -  toutes sortes de questions que je suis, pour l'instant, forcé de laisser de côté.
Je vous fais remarquer en passant ce que supporte une formule comme "il y a longtemps que je ne l'ai vu", vous ne pouvez pas 
le dire à propos d'un mort ni d'un disparu ; "il y a longtemps que je ne l'ai vu" suppose que la prochaine rencontre est toujours possible.

    Vous voyez avec quelle prudence l'examen l'investigation de ces termes doit être maniée et c'est pourquoi, au (->p168) (VII/14) moment de tenter d'exposer, non pas la dichotomie, un tableau général des divers niveaux de la négation, dans laquelle notre expérience nous apporte des entrées de matrices autrement riches que tout ce qui s'était fait au niveau des philosophes depuis Aristote jusqu'à Kant, et vous savez comment elles s'appellent, ces entrées de matrices : privation, frustration, castration, c'est elles que nous allons essayer de reprendre pour les confronter avec le support signifiant de la négation tel que nous pouvons essayer de l'identifier.

           "Pas un homme qui ne mente", qu'est ce que nous suggère cette formule "homo mendax", ce jugement, cette proposition que je vous présente sous la forme type de l'affirmative universelle, à laquelle vous savez peut-être que dans mon tout premier séminaire de cette année, j'avais déjà fait allusion à propos de l'usage classique du syllogisme "tout homme est mortel", Socrate, etc... avec ce que j'ai connoté au passage de sa fonction  transférentielle.

            Je crois que quelque chose peut-être apporté dans l'approche  de cette fonction de la négation au niveau de l'usage originel, radical, par la considération du système formel des propositions telles qu'Aristote les a classées dans les catégories dites de l'universelle affirmative et négative et de la particulière dite également négative et affirmative : AEIO

            Disons-le tout de suite : ce sujet dit de l'opposition des propositions, origine  chez Aristote de toute son (->p169) (VII/15) analyse, de toute sa mécanique du syllogisme, n'est pas sans présenter malgré l'apparence les plus nombreuses difficultés : dire que les développements de la logistique la plus moderne ont éclairé ces difficultés serait très certainement dire quelque chose contre quoi toute l'histoire s'inscrit en faux.
Bien au contraire, la seule chose qu'elle peut faire apparaître étonnante, c'est l'apparence d'uniformité dans l'adhésion que ces formules dites aristotéliciennes ont rencontrée jusqu'à Kant, puisque Kant  gardait l'illusion que c'était là un édifice inattaquable.

                        Assurément, ce n'est pas rien de pouvoir par exemple faire remarquer que l'accentuation de leur fonction affirmative et négative n'est pas articulée comme telle dans Aristote lui-même et que c'est beaucoup plus tard, avec Averroès probablement, qu'il convient d'en marquer l'origine. C'est vous dire qu'aussi bien les choses ne sont pas aussi simples quand il s'agit de leur appréciation. 
Pour ceux à qui besoin est de faire un rappel de la fonction de ces propositions, je vais les rappeler brièvement.

 

                     "Homo mendax", puisque c'est ce que j'ai choisi pour introduire ce rappel. Prenons le donc : homo, et même omnis homo : "Omnis homo mendax" = tout homme est menteur. Quelle est la formule négative ? Selon une forme qui porte et en beaucoup de langues : "omnis homo non mendax" peut suffire.  Je veux dire que "omnis homo non mendax" veut dire que de tout homme, il est vrai qu'il ne soit pas menteur. Néanmoins, pour la clarté, c'est le terme nullus que nous employons :

(p170) (VIII/16)

"nullus homo non mendax".

  A                                     : omnis homo mendax
universelle affirmative

  E                                     : nullus homo non mendax
universelle négative

                    Voilà ce qui est connoté habituellement par la lettre respectivement A et E de l'universelle affirmative et de l'universelle négative.

                    Que va-t-il se passer au niveau des affirmatives particulières ?

                    Puisque nous nous intéressons à la négative, c'est sous une forme négative que nous allons pouvoir ici les introduire : "non omnis homo mendax" ce n'est pas tout homme  qui est menteur, autrement dit, je choisis et je constate qu il y a des hommes qui ne sont pas menteurs. En somme, ceci ne veut pas dire que quiconque, aliquis, ne puisse être menteur, "aliquis homo mendax". Telle est la particulière affirmative habituellement désignée dans la notation classique par la lettre I. Ici, la négative particulière sera, le "non omnis" étant ici résumé par "nullus", : "non nullus homo non mendax" = il n'y a pas aucun homme qui ne soit pas menteur. En d'autres termes, dans toute la mesure où nous avons choisi de dire que pas tout homme n'était menteur (1er cas), ceci exprime d'une autre (->p171) (VIII/17) façon , à savoir que ce n'est pas aucun qu'il y ait à être non menteur.

            Les termes ainsi organisés se distinguent dans la théorie classique par les formules suivantes, qui les mettent réciproquement en position dite de contrelle ou de subcontrelle, c'est-à-dire que les propositions universelles s'opposent à  leur propre niveau comme ne sachant et ne pouvant être vraies en même temps. I1 ne peut en même temps être vrai que tout homme puisse être menteur et que nul homme ne puisse être menteur, alors que toutes les autres combinaisons sont possibles.

 

     I1 ne peut en même temps être  faux qu'il y ait des hommes menteurs et des hommes non menteurs.

            L'opposition dite contradictoire est celle par  laquelle les propositions situées dans chacun de ces quadrants s'opposent diagonalement en ceci que chacune exclut, étant vraie, la vérité de celle qui lui est opposée à titre de contradictoire, et étant fausse exclut la fausseté de celle qui lui est opposée à titre de contradictoire.  

            S'il y a des hommes menteurs, ceci n'est pas compatible avec le fait  que nul homme ne soit menteur. Inversement, le rapport est de la particulière négative avec l'af-(->p172) (VIII/18) firmative universelle.

        Qu'est-ce que je vais vous proposer pour vous faire sentir ce qui, au niveau du texte aristotélicien, se présente toujours comme ce qui s'est développé dans l'histoire d'embarras autour de la définition comme telle de l'universelle ? Observez d'abord que si ici je vous ai introduit le non omnis homo mendax :  le pas tout, le terme pas portant sur la notion du tout comme définissant la particulière, ça n'est pas que ceci soit légitime, car précisément Aristote s'y oppose d'une façon qui soit contraire à tout le développement qu'a pu prendre ensuite la spéculation sur la logique formelle, à savoir un développement, une explication en extension faisant intervenir la carcasse symbolisable par un cercle, par une zone dans laquelle les objets constituant son support sont rassemblés :  Aristote, très précisément, avant les "Premières Analytiques", tout au moins dans l'ouvrage qui antécède dans le groupement de ses oeuvres, mais qui apparemment l'antécède logiquement, sinon chronologiquement qui s'appelle "De l'Interprétation", fait remarquer que - et non sans avoir provoqué l'étonnement des historiens - ce n'est pas sur la qualification de l'universalité que doit porter la négation. C'est donc bien d'un quelqu'homme qu'il s'agit et d'un quelqu'homme que nous devons, interroger comme tel, comme menteur.

        La qualification donc de l'omnis, de l'omnitude, de la parité de la catégorie universelle est ici ce qui est en cause. Est-ce que c'est quelque chose qui soit du même niveau, du niveau d'existence de ce qui peut supporter, ne pas sup-(->p173) (VIII/p19)porter l'affirmation ou la négation, est-ce qu'il y a homogénéité entre ces deux niveaux ? 
Autrement dit, est-ce que c'est de quelque chose qui simplement suppose la collection comme réalisée qu'il s'agit dans la différence qu'il y a de l'universelle à la particulière ?

                Bouleversant la portée de ce que je suis en train d'essayer de vous expliquer, je vais vous proposer quelque chose, quelque chose qui est fait en quelque sorte pour répondre à quoi ? à la question qui lie justement la définition du sujet comme telle à celle de l'ordre d'affirmation ou de négation dans lequel il entre dans l'opération de cette division propositionnelle.

            Dans l'enseignement classique de la logique formelle, il est dit et si l'on recherche à qui ça remonte, je vais vous le dire, ce n'est pas sans être quelque peu piquant - il est dit que le sujet est pris sous l'angle de la qualité et que l'attribut que vous voyez ici incarné par le terme mendax est pris sous l'angle de la quantité. Autrement dit, dans l'un, ils sont tous, ils sont plusieurs, voire il y en a un. C'est ce que Kant conserve encore au niveau de "la Critique de la Raison pure" dans la division ternaire. Ce n'est pas sans soulever de la part des linguistes de grosses objections.

            Quand on regarde les choses historiquement, on s'aperçoit que cette distinction qualité-quantité a une origine : elle apparaît pour la première fois dans un petit traité paradoxalement sur les doctrines de Platon, et cela - c'est au contraire l'énoncé aristotélicien de la logique formelle qui  (->p174) (VIII/20) est reproduit, d'une façon abrégée mais non sans période didactique, et l'auteur n'est ni plus ni moins qu'Apulée, l'auteur d'un traité sur Platon - se trouve avoir ici une singulière fonction historique, c'est à savoir d'avoir introduit une catégorisation, celle de la quantité et de la qualité, dont le moins qu'on puisse dire c'est que c'est de s'être introduit et d'être resté aussi longtemps dans l'analyse des formes logiques qu'on l'y a introduit.

                    Voici en effet le modèle autour duquel je vous propose pour aujourd'hui de centrer votre réflexion. Voici un cadran dans lequel nous allons mettre des traits verticaux (sujet). La fonction trait va remplir celle du sujet et la fonction verticale, qui est d'ailleurs choisie simplement comme support, celle d'attribut. J'aurais bien pu dire que je prenais comme attribut le terme unaire mais pour le côté représentatif et imaginable de ce que j'ai à vous montrer, je les mets verticaux.  

 

(->p175) (VIII/21)

                    Ici, nous avons un segment de cadran où il y a des traits verticaux, mais aussi des traits obliques, ici il n'y a pas de trait.

Ce que ceci est destiné à illustrer, c'est que la distinction universelle/particulière, en tant qu'elle forme un couple distinct de l'opposition affirmative/négative est à considérer comme d'un registre tout diffèrent de celui qu'avec plus ou moins d'adresse des commentateurs à partir d'Apulée, ont cru devoir diriger dans ces formules si ambiguës, glissantes et confusionnelles, qui s'appellent respectivement la qualité et la quantité, et de l'opposer en ces termes. Nous appellerons l'opposition universelle/particulière une opposition de l'ordre de la lexis, ce qui est pour nous : je lis aussi bien je choisis, très exactement liée à cette fonction d'extraction, de choix du signifiant qui est ce sur quoi pour l'instant, le terrain, la passerelle sur laquelle nous sommes en train nous avancer. Ceci pour la distinguer de la phasis, c'est-à-dire de quelque chose qui ici se propose comme une parole par où je m'engage quant à l'existence de ce quelque chose qui est mis en cause par la lexis première .

Et en effet, vous allez le voir, de quoi est-ce que je vais pouvoir dire tout est vrai est vertical  ?

            Bien sûr, du premier secteur du cadran 1, mais observez-le aussi du secteur vide 2 : si je dis, tout trait est vertical, ça veut dire quand il n'y a pas de verticale, il n'y a pas de traits ? En tous cas, c'est illustré par le secteur  vide du cadran : non seulement le secteur vide ne contredit pas, n'est pas contraire à l'affirmation : "tout trait est vertical" , (->p176) (VIII/p22) mais l'illustre. I1 n'y a nul trait vertical dans ce secteur du cadran.

                Voici donc illustrée par les deux premiers secteurs l'affirmative universelle. La négative universelle va être illustrée par les deux secteurs de droite, mais ce dont il s'agit là se formulera par l'articulation suivante :                nul trait n'est vertical, il n'y a là dans ces deux secteurs nul trait. Ce qui est à remarquer, c'est le secteur commun 2 que recouvrent ces deux propositions qui, selon la formule, la doctrine classique, en apparence, ne sauraient être vraies en même temps.

                Qu'est-ce que nous allons trouver suivant notre mouvement giratoire, qui a ainsi fort bien commencé ici comme formule ainsi qu'ici, pour désigner les deux autres groupements possibles 2 par 2 des cadrans. 
Ici, nous allons voir le vrai de ces deux cadrans sous une forme affirmative. I1 y a - je le dis d'une façon phasique
              : je constate l'existence de traits verticaux - Il y a des traits verticaux, il y a quelques traits verticaux, que je peux trouver soit ici, soit ici ?

                Ici, si nous essayons de définir la distinction de l'universelle et de la particulière, nous voyons quels sont les deux secteurs qui répondent à l'énonciation particulière. Là il y a des traits non verticaux "non nullis, etc..."

                De même que tout à l'heure, nous avons été un instant suspendus à l'ambiguïté de cette répétition de négation, le non non est très loin d'être équivalent forcément au oui et (->p177) (VIII/23) c'est quelque chose vers quoi nous aurons à revenir dans la suite.

            Qu'est-ce que cela veut dire ? Quel est l'intérêt pour nous de nous servir d'un tel appareil  ?
Pourquoi est-ce que j'essaie pour vous de détacher ce plan de la lexis du plan de la phasis ?
Je vais y aller tout de suite et pas par quatre chemins. Et je vais l'illustrer.

            Qu'est-ce que nous pouvons dire, nous analystes, qu'est-ce que Freud nous enseigne puisque le sens en a été complètement perdu de ce qu'on appelle proposition universelle  , depuis justement une formulation dont on peut mettre la tête de chapitre à la formulation eulérienne qui arrive à nous représenter toutes les fonctions du syllogisme par une série de petits cercles, soit s'excluant les uns les autres, se recoupant, s'intersectant en d'autres termes, et à proprement parler en extension à quoi on oppose la compréhension qui serait distinguée simplement par je ne sais quelle inévitable manière de comprendre, de comprendre quoi ? que le cheval est blanc, qu'est-ce qu'il y a à comprendre .

            Ce que nous apportons qui renouvelle la question c'est ceci : je dis que Freud promulgue, avance la formule qui est la suivante : le père est Dieu ou tout père est Dieu.
Il en résulte, si nous maintenons cette proposition au niveau universel, celle qu'il n'y a d'autre père que Dieu, lequel d'autre part quant à l'existence est dans la réflexion freudienne plutôt aufgehoben, plutôt mis en suspension, voire en doute (->p178) (VIII/24)  radical. Ce dont il s'agit, c'est que l'ordre de fonction que nous introduisons avec le nom du père est ce quelque chose qui, à la fois, a sa valeur universelle, mais qui vous remet à vous, à l'autre, la charge de contrôler s'il y a un père ou non de cet acabit. S'il n'y en a pas, il est toujours vrai que le père soit Dieu, simplement la formule n'est confirmée que par le secteur vide du cadran, moyennant quoi au niveau de la phasis nous avons : il y a des pères qui remplissent plus ou moins la fonction symbolique que nous devons dénoncer comme telle, comme étant celle du nom du père, il y en a qui, et il y en a que pas. Mais qu'il y en ait que pas, qui soient pas dans tous les cas, ce qui ici est supporté par ce secteur 4, c'est exactement la même chose qui nous donne appui et base à la fonction universelle du nom du père ;

car groupé avec le secteur dans  lequel il n'y a rien 2, c'est justement ces deux secteurs pris au niveau de la lexis qui  se trouvent en raison de celui-ci, de ce secteur supporté qui complémente l'autre, qui  donnent sa pleine portée à ce que nous pouvons énoncer comme affirmation universelle.  

                         Je vais illustrer autrement, puisqu'aussi bien, jusqu'à un certain point, la question a pu être posée de sa valeur, je parle par rapport à un enseignement traditionnel qui doit être ce que j'ai apporté la dernière fois concernant le petit i.

                    (->p179) (VIII/25)  Ici, les professeurs discutent : qu'est-ce que nous allons dire ? le professeur, celui qui enseigne, doit enseigner quoi ? ce que d'autres ont enseigné avant lui, c'est-à-dire qu'il se fonde sur quoi ? sur ce qui a déjà subi une certaine lexis. Ce qui résulte de toute lexis, c'est justement ce qui nous importe en l'occasion, et au niveau de quoi j'essaie, de vous soutenir aujourd'hui : la lettre. Le professeur est lettré dans son caractère universel, il est celui qui se fonde sur  la lettre au niveau d'un énoncé particulier, nous pouvons dire maintenant qu'il peut l'être moitié moitié, il peut ne pas être tout lettré. Il en résultera que quand même on ne puisse dire qu'aucun professeur soit illettré, il y aura toujours dans son cas un peu de lettres.
I1 n'en reste pas moins que si, par hasard, il y avait un angle sous lequel nous puissions dire qu'il y en a éventuellement sous un certain angle qui se caractérisent comme donnant lieu à une certaine ignorance de la lettre, ceci ne nous empêcherait pas pour autant de boucler la boucle et de voir que le retour et le fondement, si l'on peut dire, de la définition universelle du professeur est très strictement en ceci, c'est que l'identité de la formule que le professeur est celui qui s'identifie à la lettre impose, exige même le commentaire qu'il peut y avoir des professeurs analphabètes. La case négative 2 comme corrélative essentielle de la définition de l'universalité, est quelque chose qui est profondément caché au niveau de la lexis primitive.

                    Ceci veut dire quelque chose : dans l'ambiguïté du support particulier que nous pouvons donner dans l'engagement de notre parole au nom du père comme tel, il n'en reste (->p180) (VIII/26) pas moins que nous ne pouvons pas faire que quoi que ce soit qui aspiré dans l'atmosphère de l'humain, si je puis m'exprimer ainsi, puisse, si l'on peut dire, se considérer comme complètement dégagé du nom du père, que même ici (vide) où il n'y a que des pères pour qui la fonction du père est, si je puis m'exprimer ainsi, de pure perte, le père non père, la cause perdue, sur laquelle a terminé mon séminaire de l'année dernière, c'est néanmoins en fonction de cette déchéance, par rapport à une première lexis qui est celle du nom de père, que se juge cette catégorie particulière.

                L'homme ne peut faire que son affirmation ou sa négation avec tout ce qu'elle engage : celui-là est mon père, ou celui-là est son père, ne soit pas entièrement suspendue à une lexis primitive dont, bien entendu, ça n'est pas du sens commun, du signifié, du père qu'il s'agit, mais de quelque chose à quoi nous sommes provoqués ici de donner son véritable support et qui est légitime même aux yeux des professeurs, qui, vous le voyez, seraient en grand danger d'être toujours mis en quelque suspens quant à leur fonction réelle même aux yeux des professeurs, doit justifier que j'essaie de donner, même à leur niveau de professeurs, un support algorithmique à leur existence de sujet comme tel.

(->p181) (VIII/27)

 

note: bien que relu, si vous découvrez des erreurs manifestes dans ce séminaire, ou si vous souhaitez une précision sur le texte, je vous remercie par avance de m'adresser un émail. Haut de Page 
commentaire            relu et corrigé en août 2002