21 Mars 1978
(p1->)Je
vous avertis que Madame « Alerseiler ? »,
Présidente de l’Université de
Paris I, Madame A…. a bien voulu faire que j’énonce mon séminaire le 11 et
le 18 avril. C’est la période es vacances et donc vous aurez probablement
tout juste à entrer par la porte qui est, non pas sur la rue St Jacques, mais
sur la place du Panthéon. En effet j’en étais réduit à deux séminaires
puisque, pour ce qui est de mai, ça sera le deuxième mardi, mais pas le troisième,
étant donné qu’on m’a averti que, dans cette salle même, il y aurait, le
troisième mardi, des examens.
Il n’en reste pas moins que je suis bien soucieux de ce qu’il en est
nommément du tore. Soury va vous passer des tores,
des tores sur lesquels il y a quelque chose de tricoté. Il y a quelque
chose qui me soucie particulièrement, c’est le rapport entre ce qu’on peut
appeler la toricité et le trouage. Il me semble, aux dires de Soury, qu’il
n’y ait pas de rapports entre le trouage et la toricité. Pour moi, je ne peux
pas dire que je ne voie pas de rapports, mais probablement que je me fais une idée
confuse de ce qu’on peut appeler un tore.
Vous avez eu, la dernière fois, une certaine présentation de ce qu’on peut faire avec le tore. Il y a quelque chose que Soury va vous passer tout à l’heure et qui comporte un trouage. C’est un trouage qui est artificiel,
(p2->)
je veux dire que c’est un tore couvert d’un tricotage qui est plus nourri
que celui simple, c’est-à-dire qui est – et c’est bien là la difficulté-
celui qui est tracé comme tricot sur le tore. Je ne vous ai pas dissimulé ce
qu ceci comporte : le fait que ce soit tracé sur le tore est tout à fait
de nature à ce que ça ne puisse, ce que je désigne « tracé »,
que ça ne puisse pas passer pour un tricot. Il n’en reste pas moins que, par
convention, on, pense, on articule que c’est un tricot. Mais il faudra y
adjoindre ce complément que ce qui peut se tracer de l’autre côté de la
surface a à s’inverser et à s’inverser en mettant en valeur l’inversion
du dessus/dessous, ce qui bien entendu complique franchement ce que nous pouvons
dire de ce qui se passe à l’intérieur du tore. C’est bien ce qui se
manifeste dans la relative complexité de ce qui est
dessiné à ce niveau. (sur le tableau de Soury, 3 ème et 4 ème étages).
Nous conviendrons de dire que l’inversion du dessus/dessous complique
l’affaire, parce que ce que j’ai appelé tout à l’heure la complexité de
ce tableau n’a rien à faire avec cette inversion qu’on peut convenir
d’appeler, parce que c’est à l’intérieur du tore au lieu d’être à
l’extérieur, qu’on peut appeler, par définition, son image en miroir. Ca
voudrait dire qu’il y a des miroir toriques. C’est une simple question de définition.
Il est un fait que c’est ce qui est à l’extérieur qui passe pour
important, à l’extérieur du tore, tracé à l’extérieur du tore. Il n’y
a pas de trace dans ces figures ( tableau de Soury, étage 3 et 4), il n’y a
pas de trace de cette inversion, que j’ai appelée l’image en miroir
torique. Le trouage est un moyen de retournement. Par le trouage, il est
possible qu’une main s’introduise et aille saisir l’axe du
tore
et, par-là, le retourne ; mais il y a quelque chose d’autre qui est
possible, c’est que par le trou, en poussant à travers le trou l’ensemble
du tore, on obtienne un effet de retournement. C’est ce que Soury
(p3->)
vous manifestera tout à l’heure à l’aide d’un tricot torique un peu plus
compliqué.
Il est frappant qu’on obtienne en poussant à l’extérieur du tore,
qu’on obtienne exactement le même résultat, ce que je justifie en disant que
ce trou par définition n’a pas à proprement parler de dimension, à savoir
que c’est ainsi qu’il peut se présenter, à savoir que ce qui est trou ici
peut aussi bien se projeter de la façon suivante.
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on peut voir qu’ici nous obtiendrons la même figure, à savoir que ce qui est
ici attrapé par le trou et ceci
repoussé à l’intérieur, après inversion de ce qui est ici, se trouvera
aussi bien fonctionner comme tore, ce qui est ici devenant l’axe.(flèche
gauche ci-dessus)
Je vais maintenant prier Soury, puisqu’il
a la bonté d’être là, de venir monter la différence- différence
nulle- qu’il y a entre ces deux façons de figurer le tricot torique.
Vous avez l’objet ?
SOURY :
Je l’ai fait passer
LACAN :
Vous l’avez fait passer.
On peut
voir, sur cet objet, la différence qu’il y a entre saisir l’axe et
repousser l’ensemble du tore.
SOURY :
J’y vais ? Alors il s’agit du retournement du tore par trouage. Je vais
le présenter de la façon suivante, c’est-à-dire c’est un tore qui est
greffé sur un plan infini. Ce dessin-là indique qu’il y a un tore qui est
(p5->)
greffé par un tuyau sur le plan infini. Là-dedans, ce qui correspond à au
trouage, c’est cette partie tuyau qui fait à la fois trouage du tore et
trouage du plan infini et pour ça, c’est pareil. Alors là-dedans, l’espace
est divisé en deux moitiés et cette surface a deux faces…une face que je
dessine ici par des poils, des poils sur le surface, est ici ; c’est une
face et il y a une autre face. Bon ! L’espace est divisé en deux moitiés,
une moitié de l’espace, la moitié qui est à gauche de ce plan infini et qui
est à l’extérieur du tore et qui fait axe pour ce tore ; et dans
l’autre moitié, enfin l’autre moitié de ce plan infini est en
communication avec l’intérieur du tore et ici je dessine quelque chose qui
fait âme. Alors cette configuration-là permet d’indiquer le retournement.
Alors je vais indiquer l’avant et l’après du retournement. Là je suis
entrain de redessiner la même chose et c’est l’avant. Et l’après du re-
tournement…alors
je montre les deux faces toujours par la même indication. Donc voici ce qui
faisait face extérieure, face gauche du plan avant, et maintenant qui après
fait toujours face gauche du plan, mais qui fait face intérieure du tore,
c’est-à-dire dans le retournement ce qui était face extérieure du tore est
devenu face intérieure.
Alors ça c’est une espèce de gant. C’est quand même pas tout à
fait un gant, c’est un gant torique, c’est un gant qui saisit, c’est un
gant qui se ferme et qui saisit. Alors ce gant qui se ferme et qui saisit peut
se retourner et ça devient encore un gant qui ferme et qui saisit. Alors une
description qui était donnée tout à l’heure, c’est une main que je vais
dessiner bleue comme ça,
(à
droite ci-dessus) (p6->)
qui vient saisir ici… Bon, cette main bleue- ce couple-là du ocre et du bleu,
c’est un couple intérieur/extérieur – cette main bleue qui vient saisir,
qui utilise ce gant, c’est à dire que ce gant torique gante cette main bleue
et par-là cette main bleue saisit, peut saisir l’axe qui est ocre ici (schéma
page 4, axe rouge), cette main qui vient utiliser ce gant comme gant peut par-là
saisir l’ase ocre. Le retournement peut, à ce moment là, être décrit de la
façon suivante, c’est que cette main bleue tire, tire… et comment elle se
retrouve ? Enfin cette main se retrouve comme ça (schéma page 5, après
le retournement). Cette main je vais la dessiner en plein, voilà la main qui
saisit et le bras et cette main se retrouve ici. Et déjà maintenant le dessin
de la main, je l’ai légèrement changé, c’est à dire que j’ai dessiné
cette main sur le mode d’une main qui saisit, c’est-à-dire que je n’ai
plus comme là laissé l’indication que les doigts ne se refermaient pas (page
4, schéma de droite). J’ai dessiné la main de deux façons différentes, je
vais maintenant modifier le dessin de la main qui est ici pour indiquer que
c’est la main qui saisit, donc je l’indique comme main fermée. Voilà.
(p7->)
J’ai donc modifié le dessin de la main comme main fermée, main qui saisit.
Voilà. Donc ici sa relation avec ce tore, c’est qu’elle est gantée par ce
tore
et
ici sa relation avec le tore, c’est qu’elle est en situation de poignée de
main avec le tore, c’est à dire
que de la main au tore ici, c’est comme une poignée de mains, c’est-à-dire
de la main au tore passer ici d’une situation de dédoublement, que le gant
est un dédoublement de la main, et ici en situation de complémentation,
c’est à dire que ces deux mains qui sont en poignée de mains se complémentent,
l’une l’autre, enfin ce sont deux tores complémentaires, deux tores enlacés,
la main qui saisit étant elle-même un tore.
Donc ce ci, c’est l’avant et l’après du retournement. Alors dans
le retournement, enfin le retournement donc peut être précisé par la
situation de cette main, soit qui est gantée, soit qui fait une poignée de
mains. Ceci peut préciser le retournement, mais ce n’est pas indispensable
pour indiquer le retournement, c’est à dire que le retournement peut être
indiqué…si cette main ne figurait pas, si cette main était absente, le
retournement pourrait être figuré quand même, c’est pousser tout ça dans
le trou ; le retournement de ce gant torique peut être fait en le poussant
dans le trou, c’est à dire le passage de l’avant à l’après qui est ici
n’a pas besoin d’être défini par une main qui saisit, qui tire et se
retrouve comme ça là. Cette main d’abord intérieure qui devient main complémentaire,
ce n’est pas indispensable, le retournement peut-être défini comme
simplement pousser toute cette partie-
(p8->)
là, la partie torique, la pousser dans le trou et il suffit de la pousser dans
le trou pour qu’elle se retrouve de l’autre côté. Autrement dit, le
saisissement ici contribue bien à décrire le retournement. La passage du
gantage à la poignée, autrement dit le passage du dédoublement du tore au
complémentaire du tore, donc le saisissement là-dedans, ce qui sert à
indiquer, ce qui l’indique, c’est ce qui l’indique, c’est que à
l’occasion du retournement, il y a passage du dédoublement à l’enlacement ;
mais ça n’est pas indispensable pour…la main, la dedans, ne fait que
montrer le tore complémentaire. Mais le retournement peut être fait même si
le tore complémentaire n’est pas présent et en poussant tout ça. Enfin en
poussant tout ça à travers le trou, ça donne ça, c’est à dire que c’est
pas…enfin on peut pousser ailleurs le tout, on peut pousser le tore et la main
et ça donnera ça, c’est à dire que là-dedans la main qui saisit n’est
qu’un dédoublement du tore qui
donc n’est pas indispensable au retournement, c’est à dire que la différence
entre la description sans la main ou avec la main, c’est la différence entre
faire le retournement d’un tore qui est ici blanc ou d’un tore dédoublé
par un tore bleu.
Alors
je dessine les deux descriptions du retournement- sauf que je viens de faire une
erreur, là c’est bleu- je redessine ce qui était dessiné précédemment,
c’est à dire précédemment ce tore avec son extérieur ici. Voilà la face
extérieur du tore qui est retournée comme ça, le face extérieur devient face
intérieure. Et ici, c’est la même chose, mais le tore est dédoublé par la
main. Et ici, alors voilà. Donc c’est deux présentations, c’est deux
descriptions voisines du retournement, dans un cas le tore isolé, dans
l’autre cas le tore avec son double, le double qui est, soit le double par dédoublement,
soit le double par enlacement, le double par dédoublement pouvant être imagé
comme la situation de gantage et le double par enlacement pouvant être imagé
par la situation de poignée de main. Bon. Voilà.
BIBETTES :
Pouvez-vous situer la position de l’axe ?
SOURY :
Alors l’axe ici, je peux le rajouter. Donc, la main gantée saisit l’axe. A
l’occasion du retournement, l’axe va devenir l’âme. Alors l’axe ici est
là, et après
(p9->)
Retournement
il est devenu l’âme, l’axe ici est là et après retournement il est devenu
âme, l’axe ici est là et après retournement il est devenu âme.(?)
X :
Pourquoi l’image de la poignée de mains, elle a l’air tellement…
Soury :
Pourquoi l’image de la poignée de main….
X :
…a l’air tellement… ?
Soury :
Pourquoi l’image de la poignée de mains a l’air tellement…dure ?
Ben, la poignée de mains, elle est complètement fermée. Ce sont des anneaux
qui sont fermés. Et il n’y a le choix qu’entre la poignée de main ou le
gantage. Elle ne permet pas… Enfin, ce que c’est que des mains qui
s’ouvrent et qui se ferment, j’en sais rien. Là, ce ne sont que des mains
toriques, des mains fermées.
Lacan :
Vous considérez que c’est de pousser qu’il s’agit ? Dans cette façon
de faire, il ne peut s’agir que de pousser l’ensemble du tore. C’est pour
ça vous avez parlé (avant /après) tout à l’heure d’ensemble du tore.
Soury :
oui, oui.
Lacan : Bien. Je vais rester là pour aujourd’hui. Rendez-vous le 11 avril.
note:
bien que relu, si vous découvrez des erreurs manifestes dans ce séminaire, ou
si vous souhaitez une précision sur le texte, je vous remercie par avance
de m'adresser un email. Haut
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