XXI-Les non-dupes errent 1973-1974
version rue CB
19 Février 1974 note
(p91->)
ALORS , CHER Rondepierre, je vous l'ai
barboté, hein ?
Je vous l'ai barboté, c'était vous qui
l'aviez commandé, mais je l'ai, je l'ai pris. Voilà.
Alors,
je ce que j'ai barboté à
Rondepierre, c'est un bouquin de Hintikka qui s'appelle Models
for Modalities .
C'est une très bonne lecture . C'est une très bonne lecture qui est bien faite
pour démontrer ce qu'il ne faut pas faire. A cet égard, c'est utile. Bon. Voilà.
Ouais . . . Quelle heure est-il
Ce
Hintikka est un Finlandais , logicien , c'est pas parce qu'il a fait ce
qu'il ne faut pas faire, que comme je viens de vous le dire, il n'est pas
très très très très utile. Il est
justement particulièrement démonstratif. Si vous lisez ce que je viens d'écrire
au tableau
Vous voyez peut-être
où ça peut
se placer, ce qu'il ne faut pas faire , vous le voyez peut-être . Enfin ,
vous le verrez mieux quand j'en aurai dit un peu plus long. Ouais . . .
Par contre - puisque j'ai encore
une petite minute - par contre , il y a un bon exemple , un bon exemple de
ce qu'on peut faire .
(p92->) C'est un autre bouquin
. C'est un autre bouquin du même Jaakko , ça se dit , parait-il - Jaakko Hintikka
, Jacques , donc qu'il s'appelle . Jaakko Hintikka a fait un bouquin qui
s'appelle Time and Necessity, avec comme sous-titre : Étude sur la
théorie
des modalités d'Aristote. Ça n'est pas mal . C'est pas mal et . . . ça
suppose , ça suppose - Je ne viens de l'avoir qu'il n'y a deux jours - ça suppose
que quelqu'un , le Hintikka en question , m'avait devancé ,
m'avait devancé depuis longtemps puisque son bouquin a non seulement été écrit
mais est sorti . . . - m'avait devancé depuis longtemps sur ce que je vous
faisais remarquer la dernière fois , que l' Organon d'Aristote , ça
vaut la peine d'être lu parce que , parce que le moins qu'on puisse dire , c'est
que , c'est que ça vous , c'est que ça vous cassera la tête , et que ce qui est
difficile , c'est bien de savoir , chez un frayeur , comme je l'ai appelé ,
comme Aristote , c'est bien de savoir pourquoi, pourquoi . . . pourquoi il a
choisi ces termes-là et pas d'autres. Voilà. Il a choisi ceux-là et pas
d'autres parce que . . . c'est pas possible en fin de compte , c'est pas
possible, c'est pas possible de dire pourquoi si, si je ne commence pas par
articuler ce que j'ai à vous dire aujourd'hui.
Ce que j'ai fait la dernière fois ,
naturellement , c'est pas rien. I1 faut le dire ! Naturellement ça a passé
inaperçu à , j'imagine plus d'une personne , mais enfin il y en a
quelques-unes qui ont marqué le coup . Bon . Alors , si je n'erre pas ,
et j'ai pas l'air, comment joue le jeu qui me guide ?
Ça
fait un verbe , ça , hein : " jouljeu "
, je jouljeux , tu jouljeux , ça continue, ça tient le coup à " il
jouljeut ". Et puis après ça flotte. Nous " jouljouons ", ou le
verbe jouljouer, ça ne peut pas tenir. Ça prouve qu'on ne jouljeut qu'au
singulier. Au pluriel, c'est douteux , ça ne se " conjeugue " pas au
pluriel , le jouljeu . Et le fait qu'il n'y ait pas de pluriel n'empêche pas
qu'il y ait tout de même plusieurs personnes au singulier. I1 y en a trois .
Justement ! C'est à ça que se reconnaît le trois du Réel, qui comme je vous
l'ai déjà . . . essayé de vous le faire sentir : il est trois , hein , et même
" étroit " comme la Porte . . . Donc , ce que j'ai fait la dernière
fois déplaçait quelque chose. Quoi ? Ce que je prétends , justement , c'est
que ça ne déplace p a s t o u t . Quelque chose , ce p a s - t o u t .
C'est même là ma chance d'être sérieux . . . Ma chance d'être sérieux ,
c'est que le sérieux ne serre pas tout . Il serre de près la série. Ce que
j'ai avance , c'est ceci, c'est qu'il y a déjà une logique. Et c'est même
ce qui peut surprendre . Si Aristote ne l'avait pas commencée , elle ne serait
pas là déjà.
Et
alors, j'arrive là et je dis : c'est
le savoir du Réel. Je le démontre à tout bout de champ , c'est le cas
de le dire . J'y reconnais le trois. Mais le trois comme
noeud. Ma chère structure,
hein, ma structure à la noix ! s'avère noeud borroméen. Naturellement. il ne
suffit pas de le nommer, de l'appeler comme ça ; parce qu'il ne suffit pas que
vous sachiez que ça s'appelle (p93->)
noeud borroméen pour que vous sachiez
en faire quelque chose. C'est le cas de le dire, n'est-ce pas - faut
l'faire. Ici point une petite lumière sur ce que je fais ; puisque c'est de là
que je suis parti, je vais dire la vérité. Ça prouve déjà que ça ne suffit
pas de la dire, pour y être, dans le vrai. Et j'avance tout de suite, n'est-ce
pas, un des points-pivots de ce dans quoi aujourd'hui j'entends avancer,
dans ce que je fais ici, comme analyste, puisque c'est de là que je parle : je
ne découvre pas la vérité , - je l'invente . A
quoi j'ajoute que c'est ça, le
savoir.
Parce
que, chose drôle, hein, c'est
marrant : personne ne s'est jamais demandé ce que c'était, le savoir ! Ah ! moi
non plus. Sauf le premier jour où comme ça, happé par le bras, enfin, dans
cette thèse, dans cette thèse qu'entre nous, hein - où il est François
Wahl ? je sais pas mais enfin qu'importe, il est peut-être là , il n'y
est peut-être pas , mais enfin , s'il est là je fais remarque que j'ai
promis un jour publiquement, comme ça, cédant à une, à une pression tendre ,
que je la republierais, cette thèse. Je l'ai dit , ça leur suffit , au Seuil. Pour la publier . . . naturellement ils ne cessaient de me mordiller les talons
au départ, au moment où j'ai sorti les Écrits , pour que je la republie ,
cette thèse, j'ai dit à ce moment-là que je voulais pas, j'ai changé
d'avis, mais eux maintenant ils ne sont pas pressés. Bref, qu'importe, après
tout, j'ai promis, mais si ça ne se réalise pas, hein, c'est évidemment pas
de ma faute. Enfin c'est quand même comme ça que j'ai été mordillé par
quelque chose, par quelque chose qui m'a comme ça , doucement , fait glisser
vers . . . vers Freud. C'était quelque chose qui avait d'ores et déjà, le
plus le plus grand rapport avec la question , enfin que je formule aujourd'hui.
C'est
singulier - ça peu
paraître frappant, n'est-ce pas que, que ce soit comme ça, à propos de
la psychose, n'est-ce pas que j'ai, que j'ai glissé vers cette question du
. . . qu'il a fallu Freud enfin, pour que je me la pose vraiment, c'est :
qu'est-ce que c'est que . . . qu'est-ce que c'est que le savoir ?
Le
savoir , ça a l'air de découvrir ,
de révéler comme on dit , ,
ma bien-aimée. Je
te montre au
monde. Toute nue. Je te dévoile. Le monde n'en peut mais, bien sûr ! Puisque
c'est de lui qu'il s'agit : quand je la montre, cette vérité-là, la bien-aimée,
c'est lui que je montre. Si j'ai dit que la logique est la
science du Réel, ça a bien évidemment un rapport, un rapport très serré avec
ceci, que la science peut être sans conscience. Parce que justement
, ça ne se dit guère , hein , que la logique c'est la science du Réel. Que ça
ne se dise guère, c'est quand même un signe , hein , c'est un signe qu'on ne
prend pas ça pour vrai . . . Ce qu'il y a de curieux c'est que, faute de le dire,
on n'est pas foutu de dire quoi que ce soit qui vaille ,
sur ce que c'est que la logique . Ça se démontre en cours, mais quand on l'annonce, là, au départ,
ouvrez n'importe quel livre de logique, vous verrez le vasouillage. C'est même
tout à fait curieux. C'est
Quoiqu'il en soit, science donc, sans
conscience, il y a quelqu'un qui a dit , un jour - il s'appelait Rabelais
, comme ça c'était quelqu'un de particulièrement astucieux , et il suffit de
lire ce qu'il a écrit pour s'en apercevoir. Écrire ce qu'a écrit Rabelais,
c'est comme pour ce que je dis : il faut le faire. " Science sans
conscience, a t-il dit , n'est que ruine de l'âme " . Eh ben, c'est
vrai. C'est à prendre, seulement, non pas comme les curés le prennent , à
savoir que ça fait des ravages , dans cette âme qui comme chacun sait n'existe
pas, mais ça fout l'âme par terre ! Vous ne vous apercevez sans doute pas que,
que je dise que ça fout l'âme par terre , c'est-à-dire que ça la
rend complètement inutile, c'est exactement la même chose que ce que je viens
de vous dire en vous disant que révéler la vérité au monde, c'est révéler
le monde à lui-même. Ça veut dire qu'il n'y a pas plus de monde que d'âme
. Et que par conséquent , enfin , chaque fois qu'on part de . . . d'un état du
monde , comme on dit , pour y pointer la vérité, on se fout le doigt dans
l'oeil ! Parce que le monde, eh ben, ça suffit déjà de l'affirmer, c'est une
hypothèse qui emporte toute le reste. Y compris l'âme. Et ça se voit bien à
lire Aristote ; le De l'âme , c'est comme pour Hintikka, je vous en
conseille beaucoup la lecture.
S'il
y a savoir , si la question peut se poser de ce que c'est que le savoir
, ben c'est tout à fait naturel , bien sûr
, que j'y aie été happé, parce que la patiente de ma thèse, " le cas Aimée ",
ben elle savait , simplement elle confirme , elle confirme ce dont vous
comprendrez que j'en sois parti, elle inventait - bien sûr ça ne suffit
pas à assurer , à confirmer que le savoir ça s'invente , parce que comme on
dit , elle débloquait . . . Seulement , c'est comme ça que le soupçon m'en
est venu. Naturellement, je ne le savais pas ! C'est bien pour ça qu'il y faut
un pas de plus dans la logique, et s'apercevoir que le savoir,
contrairement à
ce qu'avance la logique épistémique , qui part de ceci de l ' h y p
o t h è s
e , c'est même là-dessus que repose le balayage qu'elle constitue, c'est
de voir ce que ça va donner si vous écrivez - c'est comme ça qu'ils écrivent
, là-dedans - savoir de a , petit a, ( c'est pas si mal choisi,
ce
petit a, enfin, c'est un hasard si c'est le même que le mien ) , savoir
de
petit
a - il faudrait évidemment le commenter, là il désigne le sujet ;
bien sûr qu'ils ne savent pas que le sujet c'est ce dont petit
a est 1a cause , mais
enfin c'est un fait qu'ils l'écrivent comme ça :
S de petit a, alpha :
S (a, a)
La logique épistémique
part de ceci que le savoir c'est forcément ; savoir le
vrai. Vous ne pouvez pas imaginer où ça mène. A des (p95->)
folies . . . . ne serait-ce que
celle-ci, enfin, en faux, en faux duquel s'inscrit le savoir inconscient,
qu'il est impossible de savoir quoi que ce soit , supposé vrai comme tel
, sans le savoir. Je veux dire savoir qu'on sait .
D'où il résulte qu'il est tout à fait
impossible, c'est pas très difficile à obtenir, mais enfin il y a un mathématicien
très sympathique, qui se rompt à Hintikka, et qui en effet fait la très jolie
démonstration - on m'en a communiqué les notes - que le savoir qui
se supporterait de ce qu'on ne sache pas qu'on sait est strictement inconsistant
, enfin impossible à énoncer dans la logique épistémique. Ouais.
Vous
pouvez là toucher du doigt que le
savoir, ça s'invente ! Puisque cette logique, c'est un savoir. Un savoir comme
un autre - et là je voudrais vous ramener, comme ça, un peu les pieds
sur terre - c'est simplement vous rappeler, enfin, ce que
c'est que le savoir inconscient. Ça mérite p1einement le titre de savoir, hein.
Et son rapport à la vérité, il faut bien le dire, Freud s'en inquiète,
enfin, c'est même au point que ça le chamboule quand une de ses . . . - on appelait ça " patiente " à ce
moment-là , on n'avait
pas encore trouvé le terme d' " analysant " quand une
de ses patientes lui apporte un rêve qui ment délibérément .
C'est que c'est
là qu'est la faille.
Il
y a quelque chose , dans Freud , qui prêtait à cette confusion qu'on a
faite, en fin de compte, en traduisant Trieb par " instinct ".
Chacun sait que l'instínct c'est . . . c'est un savoir,
comme ça , supposé naturel . Mais il y a quelque
chose quand même qui fait un
pli, pour ce qui est de Freud, c'est l'instinct
de mort. Bien sûr, moi j'ai
fait un petit pas de plus que lui. Mais c'est dans le mauvais sens. Lui tourne
autour. Lui, lui se rend bien compte. Il faut que vous lisiez pour ça le fameux
Au-delà, oui , Au-delà du princípe du plaisir , comme par hasard.
Dans cet Au-delà, , enfin, il . . . il se tracasse , comment
quelque chose dont le module ( modèle ! )
c'est de rester à un certain
seuil, le moins de
tension possible, c'est ça qui plait à la vie, qu'il dit. Seulement, il s'aperçoit
dans la pratique que ça ne marche pas. Alors il pense que ça passe plus bas
que le seuil. A savoir que cette vie qui maintient la tension à un certain
seuil, elle se met tout d'un coup à lâcher , et que sous le seuil , la voilà
qui succombe , qui succombe jusqu'à rejoindre la mort. C'est comme ça qu'à la
fin du compte, il fait passer le machin. La vie c'est, c'est quelque chose qui
s'est levé un jour Dieu sait pourquoi, c'est le cas de le dire et puis qui ne
demande qu'à faire retour, comme tout le reste. Il confond
le monde inanimé avec la mort. II est inanimé, ça veut dire
qu'il est supposé ne
rien savoir.
Ça ne veut rien dire de plus pour quiconque donne à l'âme son équivalent sensé.
Mais ce fait qu'il ne sache rien , ça ne prouve pas qu'il
est mort !
(p96->) Pourquoi
que le monde inanimé serait ,
serait un monde mort ? Ca ne veut pas dire grand-chose , certes , mais
poser la question a aussi bien son sens . . .
Quoiqu'il
en soit , corrélativement à
cette question de l'Au-delà du principe du plaisir , Freud nage dans
ceci, qui est beaucoup plus près de la question de la mort , à savoir de ce que
c'est , hein , il part , il part et puis il lâche le truc , et c'est bien embêtant.
Il part de la question du germen et du soma. Il l'attribue à Weismann.
Je ne peux pas m'étendre. C'est pas tout à fait ça qu'a dit Weismann . Celui
qui est parti de la séparation du germen et du soma , c'est un type qui vivait
un peu avant , et qui s'appelait Nussbaum. D'ailleurs, pour
ce que vous en faites, restons-en là , ça n'a pas grande importance .
Ce qui est important, et ce qu'a frôlé
Freud à cette occasion, c'est qu'il n'y a de mort que là où il y a
reproduction de type sexuel . C'est tout .
Si
nous employons le terme d'Aristote , l' en
question , " l'appartenir à ", et si nous
l'employons de la bonne façon, de la façon dont Aristote l'emploie ,
c'est-à-dire sans savoir par quel bout l'attraper, nous voyons que
le sexe
" appartient " à la
mort , à moins que la mort
n'appartienne au sexe , et nous restons là, avec dans la main, précisément,
le manche par où nous avons attrapé la chose. Ouais.
Là où la faille se démontre dans ses
conséquences , c'est que c'est à ce propos que Freud, sous ce prétexte qu'il y
a quelque chose dans le monde qui montre que la vie quelquefois va à la mort ,
il conjoint , il y conjoint ce qu'il est quand même difficile de, d'éliminer
du sexe, c'est la jouissance ; et que, faisant le glissement qu'il n'aurait pas
fait s'il avait tenu ferme dans ses mains le noeud borroméen , il désigne de
masochisme la prétendue conjonction de cette jouissance , jouissance sexuelle ,
et de la mort . C'est un collapsus. Ouais.
S'il y a un endroit où la clinique , la
pratique , nous montrent
Alors c'est ce qui, quand même, permet d'envisager
la portée de ce que j'énonce, c'est que le savoir, le savoir là où nous le
saisissons pour 1a première fois, comme ça, maniable, maniable parce que ,
parce que c'est pas nous qui savons - c'est pas nous qui savons , que dit
un de mes élèves , et qu'il appelle ça le non-savoir , pauvre gars ! I1
s'imagine qu'il ne sait pas ! Quelle drôle d'histoire . . . Mais nous
savons tous parce que tous , nous inventons un truc pour combler le trou dans
le Réel.
Là
où il n'y a pas de rapport sexuel, ça fait " troumatisme ". On
invente. On invente ce qu'on peut, bien sûr. Quand on est pas malin, on
invente le masochisme. Sacher Masoch était un con. I1 faut voir aussi avec
quelles pincettes, enfin n'est ce pas , la personne qui voulait bien jouer le
machin , comme ça, pour lui répondre, avec quelles pincettes elle le prenait,
le Sacher Masoch ! Elle ne savait pas qu'en faire. Il n'avait que le Figaro pour
s'exprimer, hein, c'est tout dire ! Enfin, laissons Sacher Masoch ! Il y a des
savoirs plus intelligemment inventés. Et c'est bien en ça que je
dis que le Réel,
non seulement là où il y a un trou , ça s'invente, mais que c'est pas
impensable que ce soit pas par ce trou que nous avancions dans tout ce que nous
inventons du Réel , qui n'est pas rien parce qu'il est clair qu'il y a un
endroit où, où ça marche, le Réel, c'est que nous le faisons entrer comme
trois, cette chose bâtarde, parce qu'il est sûr que c'est difficile à
manipuler logiquement , cette connotation " trois " pour le Réel.
Tout ce que nous savons c'est que " un "
connote fort bien la jouissance , et que " zéro " ça veut dire " y
en a pas ", ce qui manque, et que si zéro et un ça fait deux, c'est pas ça
qui rend moins hypothétique la conjonction de la jouissance d'un côté avec la
jouissance de l'autre. Ouais.
Non seulement ça ne la rend pas plus sûre, mais
ça l'abîme. Dans un monde ni fait ni à faire, un monde totalement énigmatique,
dès qu'on essaie d'y faire entrer ce quelque chose qui serait modelé sur la
logique, et dont se fonderait que dans l'espèce dite humaine on est ou homme ou
femme . C'est très spécialement ce contre quoi s'élève l'expérience - et je n'ai pas besoin d'aller loin, quelqu'un m'a rapporté, pas plus tard qu'il
y a quelques heures, sa rencontre avec un chauffeur de taxi - ça court
les rues , hein , c'est le cas de le dire - dont non seulement il lui était
impossible, à la personne qui parlait , de dire si c'était un homme ou une
femme , mais même elle lui a demandé et lui n'a pas pu lui répondre. Quand je
dis que ça court les rues , hein quand même , c'est pas rien ! Et même
c'est de là que Freud part .
Il part, comme ça, en commentaire, l'expérience
ne lui suffit pas parce qu'il faut qu'il s'accroche un peu partout, à la
science, hein , du moment qu'il n'y a rien , il n'y a rien qui ressemble plus à
un corps masculin qu'un corps féminin, si on sait regarder à un
à savoir
l'exception autour de quoi pivote que c'est dans la mesure où cette exception
porte conséquence pour tous ceux qui croient qu'ils l'ont , qu'ils l'ont quoi ?
ce que nous n'osons même pas appeler la queue, nous appelons ça le phallus, et
c'est ce qui reste à déterminer .
Alors
que de l'autre côté c'est du dire, du dire formel quoique dire de personne
,,
non-existe x, c'est-à-dire que ce n'est que pour tout autre
qu'est niée la fonction ! ,
que la négation, disons , pour illustrer,
est laissée - je ne vais quand même pas dire à Dieu, parce que ça nous
emmerde, cette histoire, le collage de l'Autre à Dieu, mais quand même, pour
qui réalise cette sorte d'universalité qu'il n'y a pas la négation de la
fonction !, et c'est la
seule forme d'universalité du dire d'une femme,
quelle qu'elle soit. Il n'en reste pas moins - je pense que vous vous
souvenez quand même de ce que j'ai écrit au tableau , et que je ne vais pas être
forcé de le récrire, là - il n'en reste pas moins que dans cet
ensemble, ce n'est pas tout dire qui formule la fonction !
. En d'autres
termes, qu'à ma petite barre que je mets sur le A inversé,
,
signe du
quantificateur universel , la petite barre par quoi s'inscrit le pas-tout,
ce qu'il faudrait substituer, c'est le signe du dénombrable, à savoir
.
Ce
qui s'oppose à l'un du tout de l'homme , - et il n'y en a qu'un comme chacun
sait , la preuve c'est qu'on le désigne par l'article défini - ce qui
s'oppose au " tout " de l'homme , là, c'est, c'est , il faut bien le
dire , " 1es " femmes , en tant qu'il n'y a pas moyen d'en venir à
bout , sinon à les énumérer , je peux pas dire toutes parce que le propre du
dénombrable, c'est justement qu'on n'en vient jamais au bout. Et si je vous
donne ce repérage, c'est que ça vous - faut que ça vous serve à quelque
chose , faut que ça illustre ce que j'ai dit la dernière fois du dire vrai. .
Le dire vrai c'est ce qui achoppe, c'est ce qui , achoppe sur ceci : que pour
, dans un ou-ou intenable qui
serait que tout ce qui n'est pas homme est femme et inversement, ce qui décide,
ce qui fraye n'est rien d'autre que ce dire , ce dire qui s'engouffre
Alors ,
alors .
Qu'est-ce
qu'il en est du savoir ?
Bien
sûr, je ne suis pas arrivé à cette heure-ci, c'est-à-dire une
heure vingt , ou quelque chose comme ça . . . , vingt-quatre - je ne suis pas
arrivé à cette heure-ci, à même vous
Et comme
nous sommes déjà bien avant , et que je suis pas arrivé à vous en dire le
quart - ça sera tant pis , ça meublera , enfin , ce qui viendra ensuite - il faut quand même que je vous fasse sentir la portée d'une certaine
façon dont moi je fraye la logique modale .
Le
plus fort, hein, c'est que bien sûr, pour ce qui est de construire , pour
ce qui est d'inventer - et voyez là tous les échos d'intuitionnisme qu'il
vous plaira, si tant est que vous sachiez ce que c'est, je vous ai traduit
un jour le nécessaire, hein, par ce
qui ne cesse pas de s'écrire. Bon.
Sachez-le, il y a une trace dans Aristote, que la logique propositionnelle, à savoir
que quelque chose est vrai ou faux , ce qui se note zéro ou un , selon
les cas , il y a une petite trace , il y a un endroit où Aristote dérape
- je vous montrerai ça quand vous voudrez - dans le , comme
par hasard, De l'interprétation , pour ceux qui ne l'entravent pas
: il y a un endroit où ça fuse, que la logique propositionnelle est tout
aussi modale que les autres. Il est vrai que , si c'est vrai que ça
ne se situe que là où je
vous le dis, c'est-à-dire là où la contradiction n'est en fin de
compte qu'artifice, artifice de suppléance, mais qui n'en reste pas pour ça
moins vrai, le vrai jouant là le rôle de quelque chose dont on part pour
inventer les autres modes . C'est à savoir que " nécessai-(p100->)re
que : p " , quelque vérité que ce soit , ne peut se traduire que
-
car après tout, ce qui cesse de s'écrire peut aussi
Et
c'est bien en quoi ce que j'ai marqué concernant l'impossible , c'est-à-dire
ce qui sépare , mais autrement que ne fait le possible , ce n'est pas un
ou-ou, c' est un et-et . En d' autres termes, que ce soit à la
fois p et non p , c'est impossible , c'est très précisément ce que vous
rejetez au nom du principe de contradiction. C'est pourtant le Réel puisque
c'est de là que je pars , à savoir que pour tout savoir , il faut qu'il y ait
invention, que c'est ça qui se passe dans toute rencontre, dans toute rencontre
première avec le rapport sexuel.
La
condition pour que ça passe au Réel , la logique , et c'est en ça qu'e11e
s'invente , et que la logique c'est le plus beau recours de ce qu'il
en est du savoir inconscient . A savoir de ce avec quoi nous nous guidons
dans le pot-au-noir. Ce que la logique est arrivée à élucubrer, c'est non
pas de s'en tenir à ceci : qu'entre p et non p , il faut choisir,
et qu'à
cheminer selon la veine du principe de contradiction, nous arriverons à en
sortir quant au savoir. Ce qui est important , ce qui constitue le Réel,
c'est que , par la logique , quelque chose se passe , qui démontre non pas
qu'à la fois p et non p soient faux , mais que n i 1'
u n
n i l'autre ne puissent être
vérifiés logiquement d'aucune façon. C'est
(p101->) là
le point, , le point de re-départ , le point sur lequel la prochaine fois
je reprendrai : cet impossible de part et d'autre, c'est là le Réel tel que
nous le permet de le définir la logique, et la logique ne nous permet de le définir
que si nous sommes capables, cette réfutation de l'un et de l'autre, de
l'inventer.
note:
bien que relu, si vous découvrez des erreurs manifestes dans ce séminaire, ou
si vous souhaitez une précision sur le texte, je vous remercie par avance
de m'adresser un émail. Haut
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