XXI-Les non-dupes errent 1973-1974
version rue CB
8 Janvier 1974 note
(p55->) JE
VOUS SOUHAITE la bonne année, hein, quoique naturellement plusieurs personnes
, j'imagine , l'aient ici, l'aient ici commencée
mal. J'en suis, d'ailleurs. Je suis de ceux-là. De sorte qu'après tout,
mon envie était de m'excuser sur le fait que le mardi par lequel a commencé
l'année n'était de ce fait pas un vrai mardi et de vous renvoyer au suivant.
Ç'aurait été une bonne façon de me débarrasser de mon devoir
d'aujourd'hui . . . J'en
reste encore, il faut le dire, très tenté, il n'y a qu'une seule chose qui me
retient, faut vous le dire, c'est qu'aujourd'hui, vous êtes moins nombreux. Je
vous en suis si reconnaissant que c'est peut-être ce qui va me pousser,
comme ça, cahin-caha, à énoncer quelques unes des choses que , forcément
, je continue à cogiter , comme ça sur cette habitude. Le fait aussi que ce
matin, on a beaucoup dérangé ma secrétaire , pour demander si je le faisais ,
bien effectivement , et comme je ne lui ai fait aucune confidence, elle a répondu
oui . Parmi ceux-là , mon Dieu , il y en avait quelques-uns qui étaient
plutôt parmi lès meilleurs ; si j'en crois certains noms qu'on m'a rapportés
. Alors comme ils se sont dérangés aussi, ceux-là, les meilleurs, je
vais essayer d'y aller.
Alors partons de ceci , partons de ceci auquel je ne tiens pas particulièrement : à savoir que les mots aient un sens, et que ce soit un fait , quoique le problème soit à partir de ce fait , de savoir où les loger. C'est bien ce que j'ai . . . - loger ces mots bien sûr , il faut quand même vous mâcher les choses - c'est bien l'effort que j'ai fait , que j'ai fait la dernière fois , à partir de l'amour . C'est un fait que je partais de ça : que le mot existe. Et c'est en quoi la chose, la chose est à concevoir comme possible. Ce qui se traduit dans mon dire de ce qu'elle se fonde, la chose, la chose amour, qu'elle ne se fonde - puisqu'il s'agit seulement de sa possibilité - elle se fonde comme je l'ai dit de cesser de s'écrire. C'est-à-dire, de ce qu'il en reste de ça, qu'elle cesse de s'écrire. Ce qu'il en reste, je l'ai articulé, depuis ce temps, depuis ce temps, presque infini pour moi, que je me répète , à savoir la lettre d'(a)mur. La lettre d'(a)mur en tant que, enfin, ça ne fait rien d'autre qu'un tas. Un petit tas, un petit (a) d'habitudes , pas beaucoup plus . C'est au moins comme ça que j'ai lu , traduit en italien , mon fameux objet avec lequel ce petit (a) des lettres d'(a)mur n'a bien entendu que le plus mince rapport.
(p56->) Tout ça
n'empêche
pas que je dis des choses qui prennent leur air de sérieux de ce que
je traduis du sériel. C'est un fait, aussi, que je change
l'ordre de la série qui se répète,
soit ce qu'on appelle l'ordinaire . Tout est-il là , de mon
dire , de changer l'ordre ordinaire ? C'est à quoi je voudrais aujourd'hui apporter
argument . Argument propre à donner sens à des fonctions plus purement cardinales.
C'est ce que j'essaie de faire avec mon noeud borroméen. Vous le
savez, cette distinction du cardinal et de l'ordinal,
elle . . . - le pas n'a
été franchi seulement grâce à la théorie des ensembles,
Qu'est-ce que
ça veut dire " décantage ", dans l'occasion ? C'est proprement - et
c'est en cela que la métaphore du décantage ici se soutient
- c'est
proprement de la condensation de ce qui, du sens , se concentre par ce discours
de ceci : que le sens - le sens des mots - ne fait qu'appareil pour ce
que nous appellerons - si vous le voulez bien rien de plus : le coït,
sexuel.
C'est
Est-ce
que c'est vrai pour autant ? C'est vrai de cette sorte de vérité qu'instaure
ce discours , à savoir d'une vérité du moyen, si tant est que certains
se souviennent de la façon dont la dernière fois , et justement , concernant
l'amour , j'ai distingué par ce qu'il en est du noeud borroméen , la fonction
du moyen comme tel . Le moyen justement , c'est ce qui ne
fait noeud qu'à ce
qu'il y ait un ordre. A savoir que, pour prendre ces " uns " que
constituent , disons sans plus , les ronds de ficelle, il
n'y en a qu'un des trois qui, tranché, libère les deux autres, c'est ce que vous voyez dans un chaîne
à trois, à trois chaînons ordinaires, il n'y en a qu'un des trois qui
libère les deux autres. La distinction qu'il y a entre cette chaîne , cette chaîne
dont , semble-t-il , il est sensible que ce soit là l'ordre
du Symbolique un sujet, un verbe, et ce que vous voudrez - un complément
; un deux , trois , peut , ayant cet ordre , cet ordre qu'il y a quelque chose
qui fait moyen , et c'est cela même qu'on appelle , avec l'ambiguïté de ce mot
, le verbe - on peut commencer par le complément et finir par le sujet - mais
c'est le verbe qui fait moyen .
En
quoi il s'entrevoit , à la limite, que le langage, lui, n'est pas
fait de mots ; car
c'est le lien par quoi du premier au dernier, le moyen établit cette
unité qui
seule est à rompre pour que le sens disparaisse : c'est bien ce
qui montre que le langage n'est pas fait de mots , et en quoi ce qu'on
appelle - car c'est cela et rien de plus qu'on appelle une proposition - une
proposition c'est
Et cela même que
je vise cette année, c'est à ce que vous ne confondiez pas les
mots avec les lettres, puisque ce n'est que des
lettres que se fonde le nécessaire,
comme l'impossible, dans une articulation qui est celle de la logique. Si ma
façon de situer les modes est correcte , à savoir que ce qui ne cesse pas de
s'écrire : le nécessaire - ce qui ne cesse pas de s'écrire, le nécessaire - c'est cela même qui nécessite la rencontre de l'impossible, à savoir
ce qui ne cesse pas de ne pas s'écrire, qui ne peut s'aborder que par les
lettres . C'est bien là ce que - ce que ne permet d'aborder par quelque
dire que la structure que j'ai désignée de celle du noeud borroméen, c'est en
quoi, la dernière fois, l'amour était un bon test de la précarité de
ces modes. I1 est porté à l'existence, cet amour, ce qui est bien le fait de son
sens même , par l'impossible du lien sexuel avec l'objet , l'objet quelle qu'en
soit l'origine, l'objet de cette impossibilité. Il y faut si je puis dire,
cette racine d'impossible. Et c'est là ce que j'ai dit en articulant ce
principe : que l'amour c'est l'amour courtois .
I1 est évident que
l'(a)musant, si je puis m'exprimer ainsi, c'est là-dedans l'amour
du prochain en tant qu'il se soutient de vider l'amour de son sens sexuel. C'est en
cessant d'écrire le sens sexuel de la chose , qu'on la rend , comme c'est
sensible , qu'on la rend possible . C'est-à-dire pour autant , il
faut bien le dire , qu'on cesse de l'écrire . Une fois arrivée , la chose ,
l'amour, il est évident que c'est à partir de là qu'elle s'imagine nécessaire.
C'est bien le sens de la lettre d'amour, qui ne cesse pas de s'écrire mais
seulement pour autant qu'elle garde son sens, c'est-à-dire pas
longtemps.
C'est en bien en
quoi intervient la fonction du Réel. Ainsi l'amour s'avère dans son origine être
contingent, et du même coup s'y prouve la contingence
de la vérité au regard
du Réel. Car ces modes sont véritables , et même définissables en fait , par
notre épinglage de l'écriture . Ils écartèlent , si je puis dire , la vérification
de l'amour, et d'une façon qui par une des ses faces ,
Pour mon noeud ,
dit borroméen , et le fait que je m'efforce d'égaler mon dire à ce qu'il
comporte , si ce qu'il noue comme je l'énonce, c'est proprement l'Imaginaire,
le Symbolique et le Réel, ceci ne tient qu'à ce qu'il commande que j'énonce
de ce seul fait , que je les noue du noeud borroméen , que chacun des trois ne
se produise que d'une consistance qui est la même pour les trois. A savoir que
sous l'angle où je les prends cette année dans mon dire, il n'y a que l'écriture
qui les distingue. Ce qui est ici, tautologie, s'ils ne sont pas écrits tous
les trois, je viens dire qu'ils sont les mêmes , il n'y a que 1'écriture
qui les fait trois. Ce qu'il faut bien articuler, c'est que c'est dans l'écriture
du noeud même - car réfléchissez bien, ce noeud, ce ne sont
que des traits écrits au tableau - c'est dans cette écriture même que réside
l'événement de mon dire . Mon dire pour autant que cette année je pourrais l'épingler
de faire ce que nous appellerions votre é d u p a t i o n , si tant est que
c'est à mettre l'accent sur le fait que les non-dupes errent , ce qui
n'empêche pas que ça ne veut pas dire que n'importe quelle duperie n'erre pas
, mais que c'est à céder à cette duperie d'une écriture pour autant qu'elle
est correcte , que peuvent se situer avec justesse les divers thèmes de ce qui
surgit , surgit comme sens , justement , du discours analytique.
Il
faudrait que là-dessus
j'y aille tout de suite , si quelque chose ne me disait pas que vous êtes de
ce dire si . . . " sonnés " , dirais-je, sonnés, déjà, qu'il faut
bien que je fasse d'abord un filtre, ce qui est un mode d'écriture précisé
par la mathématique au principe même de la topologie , un filtre dont ces mots
retrouvent leur sens , je veux dire ce comme quoi ils fonctionnent dans l'ordre
sexuel , lequel ordre , c'est patent , n'est que le principe d'un ordinaire .
En d'autres termes justifier , non eux les termes , de cet ordre , mais cet ordre
d'eux , à ceci près que vous allez le voir - car c'est là ce
qu'aujourd'hui j'ai à dire ne sachant pas qui me suivra -, le
noeud a une fonction tout autre, tout autre que de fonder cet ordre,
l'ordre quelconque dans lequel vous pourriez enchaîner le Symbolique , l'Imaginaire
et le Réel . Ce
qu'il nous faut trouver , ce n'est pas la diversité de leur consistance, c'est
cette consistance même, à savoir ce qu'on ne peut pas dire, cette
consistance même en tant qu'elle ne les diversifie pas , mais
seulement qu'elle les noue. Pour vous affranchir , donc , puisque je
présume non sans raison vous avoir
" sonné " , il faut que je vous le rai -( r, a, i, e, tiret ) r a i
e - s o n n e . C est à-dire que j'en remette .
L'Imaginaire se
distingue en sens de ce qu'il s'imagine, comme qui dirait - si tant est
qu'ils disent peut-être parmi vous - il faut quand même que vous y
regardiez de plus près, pour dire alors que cela ne va pas de soi, et pour cette
raison que peut-être
Il n'y a rien
d'autre derrière que ce en quoi il faut s'en tenir, au support du semblant.
Certes, en tant que ce semblant est semblable à l'articulation de ce qui ne
peut se dire que sous la forme d'une vérité énoncée.
C'est-à-dire
que comme dévoilement nécessaire, c'est-à-dire incessant .
L'articulation , c'est le noeud, en tant que la lumière ne l'éclaire pas,
qu'il n'y a nul éclaircissement, bien plus : qu'il rejette toute lumière dans
l'Imaginaire. Et ce que j'énonce, ce qui est ma visée cette année , c'est
justement de vous dire que I'Imaginaire , parce qu'il est lui-même de
l'ordre du voile , n'en noircit pas pour autant. La
consistance est d'un autre ordre que l'évidence. Elle se construit de quelque chose dont je pense qu'à le
supporter des ronds de ficelle, il passera quelque chose de ceci que je vous
dis : que c'est bien plutôt l'évidement .
Le
cercle , lui ,
fait intuition , il rayonne . Il ne
s'agit pas de l'obscurcir. C'est lui qui fait l'Un. Il s'agit, du noeud,
d'en recevoir l'effet. De recevoir l'effet comme
de son Réel, à savoir
qu'il n'est pas Un. Le noeud borroméen, son Réel,
c'est de ne tenir qu'à - je n'ose pas dire " être ", il n'est pas
trois il fait tresse . Il fait tresse , et c'est là qu'il faut voir en quoi ce
que j'ai avancé tout à l'heure , à savoir que l'ordre n'y
est pas essentiel ,
est là le point important .
Il faut que vous
sentiez bien ceci : c'est que de les ranger à trois , en tant que nombre
cardinal - je vous demande pardon de l'aridité de ce que j'ai à vous
dire aujourd'hui - ceci, qui est propre au trois , ceci
n'implique nulle ordination . Quoi qu'il vous en semble , à savoir qu' 1, 2 , 3 , ça commence
à 1 - quoi qu'il vous en semble, il n'est pas possible de bien ordonner
1, 2, 3 à cette seule condition que ça se répète, et c'est ce qui se produit
dans le noeud borroméen. Mais ça n'est pas seulement à cause du noeud borroméen,
c'est à cause du nombre cardinal 1, 2 , 3 , qu'ils soient noués ou pas .
Qu'est-ce que
ça veut dire, ce que je viens de dire ?
(p60->)
C'est que à trois
cardinal, on ne peut faire - à cette seule condition qu'il n'y en ait pas
deux mêmes à la suite - on ne peut faire à les écrire que de trouver
tous les ordres tels qu'ils seraient cogitables par une combinatoire .
Écrivez
au tableau
1, 2, 3 - 1, 2, 3, rien ne vous empêche de les lire , à cette seule
condition de la prendre dans l'ordre palindromique, c'est-à-dire à
l'envers, de gauche à droite, au lieu de droite à gauche, au lieu de gauche à
droite : 1, 3, 2. Ceci veut dire, à partir du noeud, du noeud borroméen, ceci,
que je vais tâcher de vous mettre au tableau - donnez-moi
une craie- voilà comment je le simplifie le noeud borroméen. Il vous
Ce noeud, je le
retourne. Qu'est-ce que ça
Vous comptez bien
qu'il peut y avoir un autre sens, à savoir celui-ci, qui serait dextro, c'est-à-dire le sens des aiguilles d'une montre .
Etant
donné ce que
je vous ai fait remarquer tout à l'heure, à savoir que l'ordre dans le trois
- et du fait que justement d'1 2, 3, il suffit de renverser le sens ,
d'aller dans le sens palindromique pour y trouver n'importe quel ordre , vous
trouvez là une distinction de l'effet d'ordre avec ce que vous me permettrez
d'appeler l'effet du noeud, ou autrement l'effet de nodalité. C'est en ceci
qu'il convient , qu'il convient que vous souveniez de ce que j'ai énoncé
d'abord, à savoir que du noeud c'est la ternarité pure et simple, à savoir
que la portée de cette ternarité ne se soutient que de ceci
: nous ne les avons faits, d'abord... nous ne les avons pris que sous l'angle
de ce qui ne les distingue entre eux par aucune qualité qu'il n'y a aucune
diversification de l'Imaginaire par rapport au Symbolique et au Réel,
que leur substance n'est pas diverse, que
nous n'en faisons pas des qualités,
que simplement nous les considérons
sous l'espèce de cette consistance qui les fait chacun un .
Puisque
j'ai employé
le mot de " qualité " qui est un nom féminin , est-ce que je
dirai que leur qualité est " un ", ce serait une bonne occasion
d'emmancher là autour de l'Un ce qu'il en
Certes, me
direz-vous, il ne peut le faire - si tant est que vous me disiez
quelque chose - il ne peut le faire qu'à aliéner son unité dans
l'ensemble, moyennant quoi les éléments ne gardent plus rien de cette unité,
qu'à être ouverts à ce qu'on en fasse le compte , c'est-à-dire
la computation subjective, ce qui n'empêche pas que l'objectivité de l'un , je
dirai, ne fait question qu'à ceci que c'est qu'elle n'est sûrement pas sans réponse.
Et cette réponse, c'est justement en quoi j'énonce qu'elle est dans le
trois .
Qu'est-ce que
le trois fait d'un, s'il n'y a pas le deux ? Est-ce que simplement à ce
qu'il y en ait trois, l'aleph zéro est déjà là ? Il est certain que si j'énonce
que de deux il n'y a pas , parce que ce serait inscrire du même coup dans le Réel
la possibilité du rapport tel qu'il se fonde du rapport sexuel , est-ce
que ce n'est que par le trois , et comme je l'ai écrit l'autre fois au tableau
par la différence de un à trois que procède ce deux , est-ce que - tout ceci nous porte à poser la question
- il a fallu, pour que
nous fassions ce pas, qu'aleph zéro ait cessé de ne pas s'écrire ? Autrement
dit que c'est la contingence , l'événement du dire de Cantor qui nous permet
seulement d'avoir un aperçu sur ce qu'il en est , non pas du nombre, mais de ce
que constitue dans sa ternarité le rapport du Symbolique , de l'Imaginaire et
du Réel . Faut-il que de sa contingence , donc
, à ce dire de Cantor ,
nous passions au nécessaire de ce qu'il ne cesse plus , cet aleph zéro, de s'écrire
, qu'il ne cesse plus de s'écrire désormais pour que subsiste quoi ? rien
d'autre qu'une notion de vérité.
La
vérité, en
effet, jusqu'à présent dans la logique , n'a pu consister jamais qu'à contredire.
Elle est dans le dualisme du vrai et du faux. Le vrai n'étant que
supposé au savoir, en tant que le savoir s'imagine - c'est là son sens - comme
connection de deux éléments . Et c'est justement en quoi, il
est imaginaire si l'Un , si un Un, un Un tiers, ne vient
pas le connecter au prix d'y faire rajout . Rajout pas du même cercle catégorique , pas
du même ordre, disais-je tout à l'heure , mais provenant de la nodalité
.
(p63->)
Eh bien, puisque
, aujourd'hui, il a fallu que je me force pour vous mener jusque là, vous me
permettrez de m'y tenir ; et après tout,
s'il y en a que ça a découragés, je n'y vois pour moi aucun inconvénient ,
puisque la seule raison pour laquelle je vous ai parlé aujourd'hui, c'est que
vous étiez moins nombreux.
note:
bien que relu, si vous découvrez des erreurs manifestes dans ce séminaire, ou
si vous souhaitez une précision sur le texte, je vous remercie par avance
de m'adresser un émail. Haut
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commentaire relu ce 7 août 2005