J.LACAN                         gaogoa          

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XII- Les problèmes cruciaux pour la psychanalyse

               version rue CB                                                                           note

  dactylographie du Secrétariat de JL,  avec une note technique de G.T

 

Mercredi 9 Décembre 1964          note 

 

(p1->) Je remercie mon public de se montrer si attentif au moment que je reprends ces cours, que je l’ai vu la dernière fois, si nombreux.

Je commence par-là, parce qu’à la vérité, c’est pour moi une partie d’un problème que je vais essayer, je ne dirai pas seulement de poser, aujourd’hui, par rapport auquel je voudrais définir quelque chose qui pourrait s’appeler : comment cette année, allons nous travailler ?

Je dis allons-nous, ne concevant pas que mon discours se déploie en une abstraction professorale dont après tout peu importerait qui  en profite, bien ou mal, ni par quelle voie.

J’ai appris, par ces échecs qui, justement en raison de la spécificité de ma position, ne tardent jamais à me venir, que j’avais été la dernière fois, didactique, enfin, que  sur ce point, on m’accordait le bon point d’un progrès.

Ce n’est certes pas, pourtant, me semble-t-il, que je vous ai ménagé, si je puis dire car instruire le problème qui va nous occuper, d’entrée, cette année ; celui du rapport du sujet au langage, comme je l’ai fait, par ce non-sens, (p2 ->) et d’y rester, d’en soutenir le commentaire, la question assez longtemps pour vous faire passer par les voies, des défilés que je pouvais ensuite annuler d’un revers de main,  entendons bien, quant aux résultats et non quant à la valeur  de l’épreuve, pour, au terme vous faire admettre, et je dirai presque, de mon point de vue, faire passer la muscade, d’un rapport distinct, celui au sens et supporté, comme je l’ai fait, par les deux phrases, qui étaient encore tout à l’heure à ce tableau, je ne peux que me féliciter que quelque chose d’un tel discours, Soit venu à son but.

S’il est vrai qu’il y a la faille dont j’ai amorcé la formulation la dernière foi entre quelque chose que nous ne saisissons à ce niveau même où le signifiant est ce qui représente le sujet pour un autre signifiant ; s’il est vrai que cette représentation du sujet, que ce en quoi le signifiant est son représentant et que ce qui se présentifie dans l’effet de sens, qu’il y ait, entre cela, -et tout ce qui se construit comme signification- cette sorte de champ neutre, de faille, de point de hasard, ce qui vient se rencontrer, ne s’articule pas du tout d’une façon obligée, à savoir, ce qui revient comme signification d’un certain rapport, je l’ai articulé la dernière fois, qui reste à définir (p3->) du signifiant au référent, à ce quelque chose d’articulé ou non dans le réel, sur quoi c’est en venant, disons, se répercuter, pour n’en dire pas plus, maintenant, que le signifiant a engendré le système des significations.

C’est là sans doute, pour ceux qui ont suivi mon discours passé, accentuation nouvelle, quelque chose dont vous pouvez retrouver la place dans  mes schémas précédents, et même y voir que, ce dont il s’agissait dans l’effet de signifié où j’avais à vous conduire pour vous en signaler la place, au moment où l’année dernière je donnais le schéma de l’aliénation, que ce référent, c’était le désir en tant qu’il peut être à situer dans la formation, dans l’institution du sujet, quelque part, se creusant là, dans l’intervalle entre les deux signifiants essentiellement évoqués, dans la définition du signifiant lui-même, qu’ici, non pas le sujet, défaillant dans cette formulation de ce qu’on peut appeler la cellule primordiale de sa constitution, mais déjà, dans une première métaphore, ce signifié, de par la position même du sujet en voie de défaillance, avait à être relayé de la fonction du désir.

Sans doute, la formule éclairante pour désigner toutes sortes d’effets génétiques dans notre expérience analytique ; mais formule relativement obscure, si nous avons à repérer

(p4->) ce dont il s’agit, en fin de compte, essentiellement, de la valabilité (validité !) de cette formule, et pour tout dire, de la relation de développement pris dans son sens le plus  large, de la relation de position du sujet prise dans son sens le plus radical, la fonction du langage.

Si ces formules, produites d’une façon encore plus aphoristique que dogmatique, données comme point d’appui, à partir desquelles peuvent se juger, tout au moins se sérier la gamme des formulations différentes qui en sont données à tous les niveaux où cette interrogation essaie, tente de poursuivre, d’une façon contemporaine, que ce soit le linguiste, psycho-linguiste, le psychologue, le stratégiste, le théoricien des jeux, etc.

 

Les termes que j’avance, et en premier lieu, celui du signifiant représentant le sujet pour un autre signifiant, a en soi même quelque  chose d’exclusif, qui rappelle, qu’à essayer de tracer une autre voie, quant aux statuts à donner à tel ou tel niveau conçu de signifié, quelque chose, assurément est risqué qui plus où moins, annule, franchit une certaine faille, et qu’avant de s’y laisser prendre, il conviendrait peut être d’y regarder à deux fois. Encore est-ce là, la position – je dirai- quasi impérative qui bien sûr, ne peut se soutenir que de tenter une référence qui, non seulement, trouve son recours dans un développement adéquat des théories (p5) et aux faits qui, aussi,  prouvent son fondement dans quelques structures plus radicales et aussi bien, tous ceux qui, depuis quelques années, ont pu suivre ce que j’ai, devant eux, développé, savent que, il y a trois an, sur un séminaire sur l’identification, ce n’est pas sans rapport avec ce que je vous amène maintenant, que j’ai été conduit à la nécessité d’une certaine topologie qui m’a paru s’imposer, surgir de cette expérience  même la plus singulière, parfois souvent, toujours peut-être, la plus confuse, qui soit celle à laquelle nous avions affaire dans la psychanalyse à savoir l’identification.

 

Assurément, cette topologie est essentielle à la structure du langage. Parlant structure on ne peut pas ne pas l’évoquer. La remarque première, je dirais même primaire, que tout déroulé dans le temps que nous devions concevoir le discours, s’il est quelque chose que l’analyse structurale telle qu’elle s’est opérée en linguistique est faite pour nous révéler, c’est que cette structure linéaire n’est point suffisante pour rendre compte de la chaîne du discours concret, de la chaîne signifiante, que nous pouvons l’ordonner, l’accorder que sous la forme de ce qu’on appelle dans l’écriture musicale, une portée, que c’est moins que nous ayions à dire et que dès lors, la question de la fonction  de cette (p6->) deuxième dimension comment la concevoir et que, si c’est là quelque chose qui nous oblige à la considération de la surface et sous quelle forme celle jusqu’ici formulée dans l’intuition de l’espace telle que, par exemple, elle peut s’inscrire dans les  éthiques  transcendantales, ou si c’est autre chose, si c’est cette surface telle qu’elle est théorisée précisément au niveau de ce qui s’appelle dans la théorie des mathématiques, des surfaces prises étroitement sous l’angle de la topologie, si ceci nous suffit, bref, si cette portée,  cette portée sur laquelle il convient d’inscrire toute unité, toute signifiance ou phrase assurément à ces coupures, comme aux deux extrémités de la suite de ces mesures  cette coupure vient-elle serrer, striger ?, sectionner la portée, qu’il y a à cet endroit, plus d’une façon de s’interroger, qu’il y a fagot et fagot.

Assurément, il n’est pas trop tôt, devant cette structure, pour reposer la question de savoir si bien effectivement, comme jusqu’à présent la chose a passé pour aller de soi dans un certain schématisme naturel, le temps est à réduire à une seule dimension. 

Mais laissons pour l’instant. Et pour nous en tenir à ce curieux flottement au niveau de ce que peut être cette surface, vous le voyez, toujours indispensable à toutes nos ordinations, c’est bien les deux dimensions du tableau (p7->) qu’il me faut. Encore est-il visible que chaque ligne n’a  point une fonction homogène aux autres. Et simplement d’abord, pour ébranler le caractère intuitif de cette fonction de l’espace en tant qu’elle peut nous intéresser, j’irai ici, à vous faire remarquer que, dans cette première approche que j’évoquai des années précédentes, à une certaine topologie très structurante de ce qu’il advient du sujet en notre expérience, le rappel de ce dont j’avais été amené  à me servir, est quelque chose qui ne fait point partie d’un espace qui semble intégré à toute notre expérience, et dont on peut bien dire, qu’auprès de cet autre, il mérite en effet le nom d’espace familier, mais particulièrement aussi ; qu’il est un espace, appelons-le moins ou même imaginable en tout cas, auquel il convient de se familiariser, pour tel paradoxe qu’on y rencontre aisément, où telle absence de prévision à ce que, pour la première fois, vous y soyez introduits.

Pardonnez-moi d’amener ici, sous la forme d’une sorte d’amusette, quelque chose dont faites-moi le crédit de penser que nous en retrouverons peut-être ultérieurement la forme. Ces éléments topologiques, respectivement, pour parler de ceux sur lesquels j’ai mis l’accent, le trou, le tore, le cross-cap, sont vraiment séparés par une sorte de monde distinctif, qu’avec des formes, appelons- les comme les ont appelé les Gestaltistes, dont il faut bien dire qu’ils ont  (p8->) dominé, le développement d’une part de toute une géométrie, mais aussi de toute une signifiance, -je n’ai pas besoin de vous renvoyer à des recherches bien connues et pleines de mérite, citons ici seulement en passant, le Métamorphoses du cercle de Georges POULET, mais il y en aurait bien d’autres pour nous rappeler qu’au cours des siècles, la signifiance de la sphère, avec tout ce quelle comporte d’exclusif, a été ce qui a dominé toute une pensée, tout un art, peut être de la pensée et que ce n’est point seulement à le voir culminer dans tel grand poème, poème dantesque par exemple que nous pouvons sonder, mesurer l’importance de la sphère et même avec ce que nous pouvons lui apporter comme étant si je puis dire, « de son monde », le cône impliquant tout ce qui a été entériné dans la géométrie comme section conique, c’est la un monde dont diffère celui qu’introduisent les références auxquelles je faisais allusion tout à l’heure.

Je vais vous en montrer un exemple, en vous interrogeant, bien sûr, je ne prendrai aucune de ces structures topologiques que j’ai énumérées tout à l’heure, parce qu’elles sont en quelque sorte, pour notre objet, pour l’instant, celui du petit choc, que j’essaie d’obtenir, trop compliqués, et d’autre part, si la forme plus familière, que tout le monde finit bien par avoir entendu passer à son horizon auditif, celle de la bande de Moebius, ai-je besoin de vous rappeler (p9->) ce que c’est. Vous en voyez apparemment, -ne tenez pas compte, vous verrez tout à l’heure ce que veut dire, de la multiplicité de l’épaisseur, mais simplement de la forme qui fait que quelque chose, qui, pourrait être, si vous voulez au départ, comme un segment cylindrique, du fait que, en même temps, on peut faire le tour, à la paroi, je m’exprime en des termes exprès référés à la matière, l’objet, l’inversion qu’on produit, aboutit à l’existence d’une surface dont le point le plus remarquable est qu’elle n’a qu’une face à savoir que, de quelque point qu’on parte, on peut aboutir, par le chemin qui reste, sur la face d’où l’on est parti, à quelque point que ce soit de ce qui pourrait faire croire, être une face et l’autre. Il n’y en a qu’une. C’est également vrai qu’elle n’a qu’un bord.

Ceci assurément, supposerait l’avancée de toutes sortes de définitions, la définition d’un bord, par exemple, qui est essentiel et qui peut être pour nous, du plus grand usage.

Ce que je veux vous faire remarquer, et ceci d’abord qui ne sera que pour, je dirai les plus novices à considérer ce même objet, pouvez vous dirai-je, prévoir, si vous ne le savez déjà, ce qu’il arrive, cette surface étant constituée, ce  qu’il arrive, si on la coupe, en restant toujours très exactement à égale distance de ses bord, c’est à dire si on la coupe en deux, longitudinalement ?

(p10 ->)Tous ceux qui ont déjà là-dessus ouvert quelques livres, savent ce qu’il en est. Cela donne le résultat suivant : à savoir non pas la surface divisée, mais une bande continue, laquelle a d’ailleurs la propriété de pouvoir exactement reproduire la forme de la surface première, en se recouvrant elle-même. C’est en sorte une surface qu’on ne peut pas diviser, au moins au premier coup de ciseaux.

Autre chose, plus intéressant et que vous n’aurez, je pense, car je ne l’y ai point vu, pas trouvé dans les livres. Il s’agit du problème suivant : la surface étant constituée, peut–elle être doublée, recouverte par une autre qui vient exactement s’appliquer sur sa forme ?

Il est très facile de s’apercevoir, à faire l’expérience, qu’à doubler d’une surface exactement égale à la première, celle que nous allons appliquer sur elle, nous arriverons au résultat que la terminaison, de la seconde bande que nous avons introduite dans le jeu, cette terminaison s’affrontera puisqu’elle a, à l’autre terminaison de la même bande, puisque nous avons dit, par définition que ces surfaces sont égales, mais que ces deux terminaisons seront séparées par la bande première, autrement dit, qu’elles ne pourront se rejoindre, qu’à traverser la première surface.

Ceci n’est pas évident et se découvre par l’expérience, est étroitement solidaire, du premier résultat (p11->) d’ailleurs plus connu, que je vous évoquai.

Avouez que, cette traversée, nécessaire, de la surface par la surface qui la redouble, voilà quelque chose qui peut nous apparaître, être bien commode pour signifier le rapport du signifiant au sujet. Je veux dire : le fait d’abord, toujours à rappeler, en aucun cas sauf à le dédoubler, ne saurait se signifier lui-même ; point très fréquemment sinon toujours oublié , et bien sûr oublié avec le plus d’inconvénient, là il conviendrait le plus de s’en souvenir.

D’autre part, c’est peut-être lié à cette propriété topologique que nous devons chercher, ce quelque chose, d’inattendu, de fécond, si je puis dire dans l’expérience, que nous devons reconnaître, pour, en tout point comparable à un effet de sens.

Je pousse encore plus loin cette affaire, dont vous verrez peut-être plus tard des implications beaucoup plus sensibles ; assurément, si nous continuons la couverture de notre surface première, bande de Moebius, par une surface qui n’est plus cette fois, équivalente à sa longueur mais le double, nous arriverons en effet si tant est  que ces mots aient un sens, à l’envelopper au-dedans et au dehors. C’est ce qui est effectivement réalisé ici. Entendez qu’au milieu, il y a une surface de Moebius, et autour une surface du type de la surface dédoublée quand tout à l’heure je la coupai avec un ciseau au milieu, ce qui la recouvre, je (p12->) répète, si ces mots ont un sens : au-dedans et au dehors, alors vous constatez que ces deux surfaces sont nouées.

En d’autres termes, et ceci d’une façon aussi nécessaire que peu prévisible à l’intuition simple qui est bien là, pour nous donner l’idée que la chaîne signifiante, comme bien souvent les métaphores atteignent un but qu’au préalable, elles ne croyaient viser que d’une façon approximative que la chaîne signifiante a peut être un sens bien plus plein, au sens où il implique  chaînon  et chaînon qui s’emboîte, que nous ne le supposions d’abord.

Je sens peut-être quelque chose comme une hésitation devant le caractère un peu distant par rapport à mes problèmes, de ce que je viens d’apporter ici.

Néanmoins, la division du champ que peut apporter cette structure : la surface de Moebius, si nous la comparons à la surface qui la complète dans le cross-cap, et qui est un plan doué  de propriétés spéciales, il n’est pas seulement gauche, il est quelque chose, dont on ne peut dire d’ailleurs que ceci, c’est qu’il comporte sa jonction éventuelle par une surface de Moebius.

Le huit intérieur comme je l’ai appelé, imaginez ceci où encore il s’agit de le remplir par une surface imaginaire, imaginez ceci simplement comme un cercle, pour vous l’imaginer simplement imaginez d’abord cette forme d’un cœur, (p13->)  et que cette partie, ici à droite, ait peu à peu empiété comme vous la voyez finalement le faire, sur la gauche. Il est clair que les bords sont continus, que l’homologie, le parallélisme, si vous voulez, dans laquelle entre, par rapport à leur opposé ces bords, c’est là ce qui vous permet, plus facilement, d’y loger une surface, comme la bande de Moebius, suivant la surface que vous engendrerez, la suivre ainsi, l’espace entre les bords affrontés, vous aurez effectivement cette sorte de retournement, de cette surface qui était tout à l’heure ce que je vous faisais remarquer vers la définition même de la bande.

Mais ici que se passe-t-il si nous complétons cette surface par l’autre. C’est que la bande de Moebius coupe nécessairement  la dite portion en un point d’ailleurs, donc en une ligne dont la localisation importe peu mais qui, pour l’intuition se révèle ici la plus évidente.

Qu’est-ce à dire ? C’est que si nous nous mettions éventuellement à faire fonctionner une telle coupure à la façon mais à la place de ce dont la logique des classes prise en extension se sert de ce que l’on appelle les cercles d’Euler, nous pourrions mettre en évidence, certaines relations essentielles. Mon discours ne me permet pas de le pousser ici jusqu’au bout, mais sachez que concernant un syllogisme par exemple, aussi problématique que celui-ci,

(p14->) « Tous les hommes sont mortels »,

2) Socrate est un homme »

3) « Socrate est mortel »

syllogisme dont j’espère qu’il y a ici un certain nombre d’oreilles, si eles veulent bien admettre au débat, autre chose que la signification, ce que j’ai appelé l’autre jour le sens, que ce syllogisme a quelque chose qui nous retient et qu’aussi bien, la philosophie ne l’a point sortie d’emblée ni dans un contexte pur, qui n’est nulle part dans les Analytiques d’Aristote qui je suppose, s’en serait bien gardé. Non pas certes, que ce soit simplement le sentiment de la  révérence ou du respect qui l’eut empêché de mettre celui d’où sortait toute une pensée en jeu avec le commun des hommes ; mais qu’il n’ai pas su que le terme Socrate, en ce contexte, puisse être introduit sans prudence.

     Et nous voilà portés, -ici j’anticipe- en plein cœur, d’une question de l’ordre précisément de celle qui nous intéresse. Il est singulier qu’un moment de floraison de la linguistique, la discussion, sur ce que c’est : le nom propre, soit entièrement en suspens. Je veux dire : que s’il est paru exact, et vous le connaissez, je pense, un certain nombre, que toute sortes de travaux remarquables, toutes sortes de prises de positions éminentes sur la fonction du nom propre au regard de ce qui semble aller de soi, la (p15->)première fonction du signifiant, la dénomination, assurément, pour simplement introduire ce que je veux dire, la chose qui frappe, c’est qu’à s’introduire dans un des développement divers très catégorisés qui se sont poussées sur ce thème, a une véritable valeur, je dois dire fascinatoire, sur tous ceux qui s’en aperçoivent, il apparaît  avec une très grande régularité, à la lecture de chaque auteur, que tout ce qu’ont dit les autres, est de la plus grande absurdité.

     Voilà quelque chose qui est bien destiné à nous retenir et je dirais, à introduire, ce petit coin, ce petit biais, dans la question du nom propre, quelque chose qui commence par cette chose  toute simple : «  Socrate- et je crois vraiment qu’au terme, il n’y aura pas moyen d’éviter cette première appréhension, ce premier ressort- Socrate c’est le nom de celui qui s’appelle Socrate. Ce qui n’est pas du tout dire la même chose car il y a le sacré bonhomme, le Socrate des copains, il y a le Socrate designator, je parle de la fonction du nom propre, il est impossible de l’isoler sans poser la question de ce qui s’annonce au niveau du nom propre.

     Que le nom propre ait une fonction de désignation, voire même comme on l’a dit, ce qui n’est pas vrai, de l’individu comme tel, car à s’engager dans cette voie, vous le verrez, on arrive à des absurdités, qu’elle ait cet usage, n’épuise (p16->)  absolument pas la question de ce qui s’annonce dans le nom propre. Vous me direz, eh bien, dites-le, mais justement, en fait ceci nécessite quelque détour.

     Mais assurément, c’est bien là l’objection que nous avons à faire au « Socrate est mortel » de la conclusion, car ce qui s’annonce dans Socrate  est assurément dans un rapport tout à fait privilégié à la mort puisque, s’il y a quelque chose dont nous soyons sûrs, sur cet homme dont nous ne savons rien, c’est que la mort, il la demandait, et en ces termes : « Prenez-moi, tel que je suis , moi, Socrate, l’atopique, ou bien tuez-moi » Ceci, assuré, univoque et sans ambiguïté.

     Et je pense que, seul l’usage de notre petit cercle, -non point Eulérien mais réformé- d’Euler, nous permet, en inscrivant tout au pourtour, dans un parallélisme dévorant,

« tous les hommes,                         « Socrate

sont mortels »                           est mortel »

considérez que la jonction de ces formules majeures et conclusion est ce qui va nous permettre de répartir deux champs du sens ; assurément un champ de signification où il paraît tout naturel que Socrate vienne en parallélisme à ce « tous les hommes » et s’y insère ; un champ de sens aussi qui recoupe le premier et par où la question se pose pour nous de savoir si nous devons donner au « est un homme » (p17->) qui nous vient là-dedans, et bien plus pour nous que pour quiconque, d’une façon problématique, le sens d’être dans le prolongement de ce recoupement du sens à la signification, à savoir, à savoir si être un homme, c’est oui où non, demander la mort, c’est à dire de voir rentrer par-là  ce simple problème de logique et à ne faire intervenir que des considérations de signifiants, l’entrée en jeu de ce que Freud à introduit comme pulsion de mort.

     Je reviendrai sur cet exemple. J’ai parlé tout à l’heure de Dante et de sa topologie finalement illustrée dans son grand poème. Je me suis posé la question. Je pense que si Dante revenait, il se serait trouvé, au moins dans les années passées, à l’aise, à mon séminaire.   

     Je veux dire, que ce que, ce n’est pas parce que, pour lui tout vient pivoter de la substance et de l’être autour de ce qui s’appelle point, qui est le point à la fois d’expansion et d’évanouissement de la sphère, qu’il n’aurait pas trouvé le plus grand intérêt à la façon dont nous avons interrogé le langage, car, avant sa divine comédie, il a écrit le De vulgari eloquentia, il a écrit aussi la Vita nuova, il a écrit la Vita nuova autour du problème du désir et à la vérité la Divine comédie ne saurait être comprise sans ce préalable. Mais assurément, dans De vulgaris eloquentia, il manifeste, sans aucun doute avec les impasses, (p18->)   sans aucun doute, avec des points de chute exemplaires, où nous savons que ce n’est point là qu’il faut aller, c’est pour cela que nous essayons de réformer la topologie des questions, il a manifesté le plus vif sens du caractère premier et primitif du langage, du langage maternel, dit-il en l’opposant à tout ce qui, à son époque, était attachement, recours obstiné à un langage savant, et pour tout dire, préemption de la logique sur le langage.

     Tous les problèmes de jonction du langage à ce qu’on appelle la pensée, et Dieu sait avec quel « accent », quand il s’agit de l’un et l’autre chez l’enfant, à la suite de M. Piaget par exemple, tout repose dans la fausse route, dans le fourvoiement des recherches par ailleurs jaillissantes quant aux faits méritoires, quant aux groupements médités, dans l’accumulation, tout ce fourvoiement repose sur la méconnaissance de l’ordre qui existe entre langage et logique.

     Tout le monde sait, tout le monde reproche aux logiques les premières sorties

      Et nommément à celle d’Aristote, d’être trop grammaticales, trop subissant l’empreinte de la grammaire. O combien vrai ! Es-ce que ce n’est pas justement pas cela qui nous l’indique ? que c’est de là qu’elles partent, je parle jusqu’aux formes les plus raffinées, les plus épurées que nous sommes arrivés à donner à cette logique, je parle des logiques dites symboliques, du logico-mathématisme, de (p19->) de tout ce que dans l’ordre de l’axiomatisation, de la logistique, nous avons pu supporter de plus raffiné, la question, pour nous, n’est point  d’installer cet ordre de la pensée, ce jeu pur et de plus en plus serré que, non sans intervention de notre progrès dans les sciences, nous arrivons à mettre au point, ce n’est pas de le substituer, au langage, je veux dire de croire que le langage n’en est , en quelque sorte, que l’instrument, qu’il s’agit, car tout prouve, et au premier plan, justement notre expérience analytique, que l’ordre du langage, et du langage grammatical, car le recours à la langue maternelle, à la langue première, celle que parle spontanément le nourrisson et l’homme du peuple, n’est point objection pour Dante contrairement aux grammairiens de son époque, à voir l’importance exactement corrélative de la lingua grammatica, c’est cette grammaire là qui lui importe et c’est là qu’il ne doute pas de retrouver la langue pure.

     C’est tout l’espace, toute la différence qu’il y aura entre le mode d’abord de Piaget et celui par exemple de quelqu’un comme Vygotsky,- j’espère que ce nom n’est pas étranger ici à toutes les oreilles,- c’est un psychologue, expérimentaliste, vivant tout de suite après la révolution de 1917 en Russie, qui a poursuivi son œuvre jusqu’à l’époque où il est mort, hélas, prématurément en 1934.

     (p20->) Il faut lire ce livre ou bien, - puisque j’ai posé la question : « Comment allons nous travailler ? », il faut que quelqu’un, et j’aille dire dans quelles conditions, prenne la charge, de cet ouvrage ou de quelque autre, d’en faire, si l’on peut dire, l’éclairage, à la lumière des grandes lignes de référence qui sont celles dont nous essayons ici de donner le statut, pour y voir, et d’une part, ce qu’elle apporte, si je puis dire à cette eau, à ce moulin et aussi bien ce en quoi elle n’y répond que d’une façon plus où moins naïve, c’est évidemment, dans un cas comme celui là, la seule façon de procéder, car si ce livre et la méthode qu’introduit Vygotsky se distinguent d’une très sévère séparation, d’ailleurs tellement évidente dans les faits qu’on s’étonne de ne , dans le dernier article, qui je crois, soit paru de Mr Piaget, qui est celui qui est paru dans le recueil des psycholinguistiques, il maintienne en somme dur comme fer, et qu’il a pu répondre  dans un petit factum qui a été joint au livre tout exprès dans l’évolution de sa pensée, eu égard à la fonction du langage, que c’est plus que jamais qu’il tient, à ce que le langage, sans doute, dit-il, sans doute aide-t-il au développement chez l’enfant de concepts dont il veut que, je ne dis pas les concepts ultérieurs, mais les concepts chez l’enfant tels qu’ils les rencontrent à leur appréhension une limite, que ces concepts soient  (p21->) toujours étroitement liés à une référence d’action que le langage ne soit là que comme aide, comme instrument mais secondaire, et dont il ne se plaira toujours qu’à mettre en relief, dans l’interrogatoire de l’enfant, l’usage inapproprié.

     Or, toute l’expérience montre au contraire, qu’assurément si quelque chose est frappant dans le langage de l’enfant qui commence à parler, ça n’est point l’inappropriation, c’est l’anticipation, c’est la précession paradoxale de certains éléments du langage, qui devrait d’ailleurs paraître qu’après, si je puis dire, les éléments d’insertion concrète, comme on dit, se soient suffisamment                           , c’est la précession des particules, des petites formules, des peut-être pas, des mais encore, qui surgissent très précocement dans le langage de l’enfant, montrant même pour peu qu’on le voit un peu de fraîcheur, de naïveté, sous certains éclairages qui permettraient de dire, et après tout, s’il le faut ici j’apporterai les documents, que la structure grammaticale, est absolument corrélative des toutes premières apparitions du langage.

     Qu’est-ce à dire, sinon que ce qui importe, n’est point assurément de voir ce qui se passe dans l’esprit assurément quelque chose qui, avec le temps, se réalise, puisqu’il devient l’adulte que nous croyons être, c’est que, si à un (p22->) un certain stade, de certaines étapes, sont à relever dans son adéquation au concept, et la nous serons frappés que quelqu’un comme Vygotasky, je le dis seulement en passant, sans en tirer plus de parti, d’avoir justement posé son interrogation dans les termes que je vais dire, à savoir tout différent, de ceux de Piaget, s’aperçoit que même un  maniement rigoureux du concept, il le dénote à  certains signes, peut être, en quelque sorte, fallacieux  et que le vrai maniement du concept n’est atteint, dit-il, singulièrement et malheureusement sans en tirer les conséquences, qu’à la puberté.

     Mais laissons cela. L’important serait d’étudier comme le fait Vygotsky, et ce qui est aussi bien pour lui la source d’aperception extrêmement riche, bien qu’elle n’ait pas été depuis, dans le même cercle, exploitée, de ce que l’enfant fait spontanément, avec quoi, avec les mots sans lesquels assurément tout le monde est d’accord, il n’y a pas de concept, qu’est ce qu’il fait donc des mots, de ces mots, que, dit-on, il emploie mal, mal par rapport à quoi, par rapport au concept de l’adulte qui l’interroge mais qui lui servent quand même à un usage très précis, usage du signifiant, qu’est ce qu’il en fait, qu’est ce qui correspond, chez lui, de dépendant du mot du signifiant, au même niveau où va s’introduire, rétroactivement, de par sa participation, (p23->)  à la culture, que nous appelons « celle de l’adulte », disons, par la rétroaction des concepts que nous appellerons scientifiques, si tant est que ce soit eux, à la fin qui gagnent la partie, qu’est ce qu’il fait avec les mots qui ressemblent à un concept ?

     Je ne suis pas là aujourd’hui pour vous donner le résumé de Vygotsky puisque je souhaiterai que quelqu’un d’autre s’en occupe. Ce que je veux dire, c’est ceci : c’est que nous voyons reparaître la porte, dans toute sa fraîcheur de ce qu’un jour Darwin, avec son génie de la découverte et qui est bien connu : le cas de l’enfant qui commence, tout au début de son langage, à appeler quelque chose, disons, en français, ça ferait coi coin ; que c’est phonétisé, c’est un enfant américain, que c’est phonétisé coé, que ce coé qui le signifiant qui l’isole, je dirai , pris à sa source originelle, parce que c’est le cri du canard, le canard qu’il commence par dénommer coé, il va le transporter du canard à l’eau dans laquelle il barbotte, de l’eau à tout ce qui peut venir également y barboter, ceci sans préjudice de la conservation de la forme de volatile, puisque ce coé désigne aussi tous les oiseaux  et qu’il finit par désigner quoi ? je vous le donne en mille : une unité  monétaire qui est marquée du signe de l’aigle dont elle était à ce moment  frappée, je ne sais pas si c’est encore le cas aux États-Unis.

     (p24->) On peut dire que, dans bien des matières, la première observation, celle qui frappe, celle qui se véhicule dans la littérature, et quelquefois chargée, enfin, d’une espèce de bénédiction, ces deux extrêmes du signifiant, qui sont le cri par où cet être vivant, le canard, se signale et qui commence à fonctionner  comme quoi ? Qui sait ? Es-ce un concept ?  Est-ce son nom ? Son nom plus probablement car il y a un mode d’interroger la fonction de la dénomination  c’est de prendre le signifiant comme quelque chose qui soit se colle, soit se détache de l’individu qu’il est fait pour désigner et qui aboutit à cette autre chose, dont croyez bien, je ne crois pas que ce soit hasard et rencontre, trouvaille de l’individu, que ce soit pour rien que ce soit  quelque participation, très probablement nulle qui la conscience de l’enfant, que ce soit une monnaie à quoi ceci s’attache à la fin, je n’y vois nulle confirmation psychologique, disons que j’y vois, si je puis dire, l’augure de ce qui guide toujours la trouvaille quand elle ne se laisse pas entraver dans sa voie par le préjugé. Ici Darwin, d’avoir seulement cueilli cet exemple sur la bouche d’un petit enfant, nous montre les deux termes, les deux termes extrêmes autour desquels se situent, se nouent et s’insèrent, aussi problématique l’un que l’autre, le cri d’un côté, et de l’autre, ceci, dont vous serez  peut-être étonnés que je (p25->) vous dise que nous aurons à l’interroger à propos du langage, à savoir la fonction de la monnaie.

     Terme oublié dans les travaux des  linguistes mais dont il est clair qu’avant eux et dans ceux qui ont étudié la monnaie dans leur texte, on voit venir sous leur plume, en quelque sorte , nécessairement, la référence avec le langage. Le langage, le signifiant comme garantie de quelque chose qui dépasse indéfiniment le problème de l’objectif et qui n’est pas non plus, ce point idéal où nous pouvons nous placer, de référence à la vérité.

     Ce dernier point, la discrimination, le tamis, le crible, à isoler la proposition vraie, c’est, vous le savez,  de là que part c’est le principe de toute axiomatique, M Bertrand Russel et ceci a donné trois énormes volumes qui s’appellent Principia mathematica, d’une lecture absolument fascinante, si vous êtes capable de vous soutenir pendant autant de pages au niveau d’une pure algèbre et dont il me semble , au regard du progrès même des mathématiques, l’avantage ne soit pas absolument décisif. Ceci n’est point notre affaire.

     Ce qui est notre affaire est ceci : c’est l’analyse que M. Bertrand Russel donne du langage. Il y a plus d’un de ses ouvrages auxquels vous pourrez vous référer, je vous en donne un qui traîne actuellement partout, vous pourrez l’acheter, c’est le livre Signification et vérité paru chez Flammarion,

(p26->) Vous y verrez que d’interroger les choses sous l’angle de cette pure logique, M. Bertrand Russel, conçoit le langage comme une superposition, un échafaudage, en nombre indéterminé d’une succession de métalangages.

Chaque niveau propositionnel, étant subordonné au contrôle, à la reprise de la proposition dans un échelonnement supérieur, où il est, comme proposition première, mis en question. Je schématise bien sûr, extrêmement ceci dont vous pourrez voir l’illustration dans l’ouvrage. Je pense que cet ouvrage, comme d’ailleurs n’importe lesquels de ceux de M. Bertrand Russel, est exemplaire, en ceci que, poussant en dernier terme, ce que j’appellerai la possibilité d’une métalangue, il en démontre l’absurde précisément en ceci : que l’affirmation fondamentale d’où nous partons ici et sans laquelle, il n’y aurait, en effet, aucun problème des rapports du langage à la pensée, du langage au sujet, est ceci qu’il n’y a pas de métalangage.

Toute espèce d’abord jusque et y compris l’abord structuraliste en linguistique, est lui-même inclus, est lui-même dépendant, est lui-même secondaire, est lui-même en perte par rapport à l’usage premier et pur du langage.

Tout développement logique quel qu’il soit, suppose le langage à l’origine, dont il a été détaché. Si nous ne tenons pas ferme à ce point de vue, tout ce que nous posons comme question, ici, toute la topologie que nous essayons de développer (p27->) est parfaitement vaine et inutile, est parfaitement vaine et futile, et n’importe qui, M. Piaget, M. Russel, tous ont raison ; le seul ennui est qu’il n’arrive pas, un seul d’entre eux, à s’entendre avec aucun des autres.

Que fais-je ici ? et pourquoi je poursuis ce discours ? Je le fais peut être engagé dans une expérience qui le nécessite absolument. Mais comment puis-je le poursuivre ? puisque par les prémisses même que je viens de réaffirmer, je ne puis ce discours, le soutenir que d’une place essentiellement précaire, à savoir que j’assume cette audace énorme où chaque fois, cette place à proprement parler intenable qui est celle du sujet.

     Il n’y  a là rien de comparable avec aucune position  dite de professeur. Je veux dire que la position de professeur, en tant quelle met entre l’auditoire et soi une certaine somme, cadrée, assurée, fondée, dans la communication forme ?, la en quelque sorte, intermédiaire, barrière et rempart et précisément ce qui habitue, ce qui favorise, ce qui lance l’esprit sur les voies qui sont celles  que, trop brièvement tout à l’heure j’ai pu, comme étant celle de M Piaget, dénoncer.

     Il y a un problème des psychanalystes : vous le savez. IL arrive des choses chez les psychanalystes et même (p28->) des choses que j’ai rappelées, au début de mon séminaire de l’année dernière , assez comiques, je dirai même, farces, comme il a pu m’arriver d’avoir pendant trois ans, au premier rang du séminaire que je faisais à St Anne, une brochette  de personnes qui n’en manquaient pas une, ni non plus une seule des articulations de ce que je proférais tout en travaillant activement à ce que je fusse exclu de leur communauté. Ceci est une  position extrême, dont à la vérité, pour l’expliquer, je n’ai recours qu’à une dimension, très précise, je l’ai appelé la farce et je la situerai à un autre moment. Il aurait fallu un autre contexte pour que je puisse dire comme Abélard « O deum mundo me feat logia !!? »

     Ca peut peut-être commencer ici. Mais alors ce n’était pas de cela qu’il s’agissait. Il s’agit de ceci : d’un incident un peu gros, entre autre, de ce qui peut se passer tout le temps, dans ce qu’on appelle les sociétés psychanalytiques. Pourquoi ceci se passe-t-il ? Au dernier terme, parce que si la formule que je vous donne est vraie, des relations du sujet au sens,  si la psychanalyse est là  dans l’analyse comme tout le monde sait qu’il est, seulement, on oublie ce que ça veut dire, pour représenter le sens jusque et dans la mesure où il le  représentera effectivement, et il arrive que, bien ou mal formé, de plus en plus avec le temps, le psychanalyste s’accorde à cette position.

     (p29->) Dans cette mesure même, je veux dire, au niveau                           ?

Jugez un peu de ce qui peut en être pour les autres . Les psychanalystes, dans les conditions normales, ne communiquent pas entre eux. Je veux dire  que si le sens, -c’est la ma référence radicale- est ce que j’ai déjà approché ailleurs à propos du Witz de Freud, à caractériser dans un ordre, qui est communicable, certes, mais non codifiables dans les modes actuellement reçus de la communication identifique ! et que j’ai appelés, que j’ai évoqués, que j’ai fait pointer la dernière fois sous le terme de non-sense, comme étant la farce glacée, celle abrupte, où se marque cette limite entre l’effet du signifiant et ce qui lui revient par réflexion des faits signifiés, si en d’autres termes ,il y a quelque part un « pas de sens » c’est le terme dont je me suis servi à propos du Witz jouant sur l’ambiguïté du mot « pas » négation , au mot « pas » franchissement, rien ne prépare le psychanalyste à  discuter effectivement  son expérience avec son voisin. C’est là la difficulté ,d’ailleurs qui saute aux yeux, simplement faut-il savoir la formuler, la difficulté de l’institution d’une science psychanalytique.

     A cette impasse, qui manifestement doit être résolue par des moyens indirects, à cette impasse, bien sûr, on supplée (p30->) par toutes sortes d’artifice, que c’est bien là qu’est le drame de la communication entre analystes.

Bien sûr, il y a la solution des maître-mots . Et de temps en temps, il en apparaît. Pas souvent. De temps en temps, il en apparaît. Et l’ami Klein en a introduit un certain nombre. Et puis, d’une certaine façon, on pourrait dire que moi-même, le signifiant, c’est peut-être un maître mot. Non, justement pas. Mais laissons.

La solution  des maîtres-mots n’est point une solution encore que ce soit celle dont, pour une bonne part on se contente. Si je l’avance, si je l’avance, cette solution des maître- mots, c’est que sur la trace où nous somme aujourd’hui, il n’y a pas que les analystes qui ont besoin de la trouver. Mr Bertrand Russel, pour composer son langage fait de l’échafaudage, de l’édifice babélique des métalangues les unes des autres, il faut bien qu’il y ait une base, alors il a inventé le langage objet. Il doit y avoir un niveau, malheureusement personne n’est capable de le saisir, où le langage est en lui-même pur objet. Je vous défie d’avancer une seule conjonction de signifiant qui puisse avoir cette fonction.

D’autres bien sûr, rechercheront les maître-mots à un autre bout de la chaîne. Et quand je parle de maître-mots dans la théorie analytique, ce sera de mots tels que ceux-là.

(p31->) Il est clair qu’une signification quelconque à donner à ce terme, n’est soutenable, en aucun sens. Le maintien du non–sens comme signifiant de la présence du sujet, la topique socratique est essentielle à cette recherche même.

Néanmoins, pour la poursuivre, et en tant que la voie n’est pas tracée, le rôle de celui qui assume, non point  celui du rôle du sujet supposé savoir mais de se risquer à la place où il manque, est une place privilégiée  et qui a le droit à une certaine règle du jeu, nommément celle-ci que pour tous ceux qui viennent l’entendre, quelque chose ne soit pas fait de l’usage des mots qu’il avance, qui s’appelle de la fausse monnaie. Je veux dire qu’un usage imperceptiblement infléchi de tel ou tel des termes qu’au cours des années j’ai avancés, a signalé dès longtemps et à l’avance quels seraient ceux qui travailleraient dans ma suite, ou  qui tomberaient en route.

Et c’est pour cela, que je ne veux pas vous quitter aujourd’hui sans vous avoir indiqué ce qui a fait l’objet de mon souci, eu égard au public, et je m’en félicite, que je réunis ici.

Assurément, on peut poursuivre cette recherche pour la psychanalyse dont j’ai parlé cette année, à se tenir dans cette région qui n’est point frontière, parce qu’analogue à cette surface dont je parlais tout à l’heure, son dedans (p32->) est la même chose que son dehors.

On peut poursuivre cette recherche concernant le point X le trou du langage. On peut  la poursuivre publiquement mais il importe qu’il y ait un lieu où j’ai la réponse, que ce qui a été conservé théoriquement dans mon enseignement de la notion du signe, qui  finalement n’était peut-être à la fin restée que dans le mot, le mot voulait dire quelque chose mais que ceci prenne lieu et place, justement dans la mesure, ou mon auditoire s’est élargi.

J’ai pris la disposition suivante : les quatrièmes et s’il y en a, les cinquièmes mercredis, le jours où ici j’ai l’honneur de vous entretenir, les quatrièmes et les cinquièmes seront des séances fermées. Fermées ne veut pas dire que quiconque en est exclu. Mais qu’on y est admis sur demande. Autrement dit, étant donné que ceci ne concernera pas ce mois-ci pour la raison qu’il n’y aura pas de quatrième mercredi, je ne vous parlerai que la prochaine fois et pas le 23, le quatrième mercredi de janvier, toute personne qui se présentera ici, et qui sait, aucune raison qui ne soit pas, à la limite aussi nombreuse, mais n’est-ce pas sûr que toute les personnes qui sont ici me le demandent. La relation $ & D qui est située quelque part  à droite du graphe dont au moins certains d’entre vous connaissent l’existence, a, dans un discours, tel que celui que je poursuis ici et (p33->) dont je vous ai, je pense, suffisamment esquissé la fonction analogue, quoique inverse, de la relation analytique, pose comme structurant, sain et normal, qu’à un certain ordre de travaux participent des gens qui m’en ont formulé la demande. Je serai, j’en avertis, de la plus grande ouverture, à ces demandes, quitte, de ma part, à convoquer la personne pour en toucher avec elle le bon aloi et la mesure, mais c’est armé d’une carte sanctionnant le fait qu’à sa demande  j’aie accédée, que les quatrièmes mercredis et les cinquièmes jusqu’à la fin de l’année, ce qui fera –j’ai calculé- huit de ces séances, on viendra ici et pour travailler selon un mode, où je l’indique déjà, j’aurai à certains et je le souhaite, rencontré qui voudra m’aider sur ce point, j’aurais à donner à certains la parole à ma place.

 

 note: bien que relu, si vous découvrez des erreurs manifestes dans ce séminaire, ou si vous souhaitez une précision sur le texte, je vous remercie par avance de m'adresser un email.
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